Forum Age Of Sea Dogs

Forums RPG sur le thème des pirates => Chroniques => Discussion démarrée par: Beauchene le 03 Octobre 2011 à 15:25:17



Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 03 Octobre 2011 à 15:25:17
Je me nomme Robert de Beauchêne. Mes aïeux sont venus s’installer dans la « Belle Province » près de Montréal lorsque Monsieur de Frontenac en était gouverneur.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que pour mes parents je n’ai pas été un enfant disciplinable, loin s’en faut. Trop rebelle et mutin pour eux et mes précepteurs, insubordonné et violent, toujours prêt �  frapper et �  payer avec usure les coups que je recevais.
Mes parents, dès lors que je su marcher, redoutaient plus que tout que j’eusse où puisse manipuler des armes que ce fut coutelas, épée, flèche où autre casse-tête. Lorsqu’il advenait que je m’en procure, aucun chien, chat où cochon du voisinage n’y survivait. Je m’entraînais sur tout animal avant que de pouvoir en faire usage sur de plus nobles adversaires.  
Un jour, j’avais alors �  peine sept ans, un parti Iroquois est venu ravager le pays. Il me vint �  l’esprit, dans cette occasion, de me laisser enlever par ces sauvages, car nul n’ignorait dans la colonie que les Iroquois adoptaient les jeunes enfants qu’ils capturaient. Je pensais - �  juste raison - qu’eux ne m’empêcheraient pas, bien au contraire, d’apprendre �  me servir d’armes. C’est en effet ce qui se produisit.
Je passais six années parmi eux. J’y serais encore si une forte troupe de canadiens commandé par le Marquis de Verneuil, n’était venu saccager le canton des Iroquois qui m’avaient adopté. J’aurai au demeurant certainement été massacré, comme l’ont été presque tous, si l’un des canadiens de la troupe qui s’apprêtait �  m’achever – j’avais reçu plusieurs blessures, la dernière m’ayant couché pour le compte  - n’avait été un voisin de mes parents et qu’il eut l’heur de me reconnaître �  une tache de vin en forme de salamandre que j’avais sur le côté gauche du cou. Monsieur de Verneuil me fit soigner par ses gens et reconduire chez moi.
Si ma parentèle m’accueilli �  bras ouvert, il n’en fut pas de même du voisinage qui avait encore en vive mémoire les multiples exactions qu’ils eurent �  subir de ma part, depuis ma prime jeunesse jusqu’au jour de mon « enlèvement ».

Cinq années s’écoulèrent. Je les passais, m’absentant souvent des semaines entières, �  chasser avec des Algonquins amis où �  guerroyer avec eux contre d’autres cantons ( ils étaient prompts �  se quereller pour la moindre raison, si futile qu’elle puisse être). Un groupe d’une trentaine me désigna un jour comme leur chef.
A quelques temps de l� , une escadre Anglaise mouilla �  trois où quatre lieues sur la rivière saint Laurent et posa �  terre un bon millier d’hommes pour prendre la ville. Incidemment, un navire de flibuste relâchait depuis quelques jours dans le port pour vendre son butin.
Le gouverneur, Monsieur le Comte de la Bouère, manda au capitaine, nommé Maupin, ainsi qu’�  moi avec mes Algonquins, de harceler les flancs Anglais et les colonnes qui s’écartaient pour quérir du ravitaillement, ce que nous fîmes avec assez de succès. Après une couple de semaines, les flibustiers et moi-même, dûmes nous replier et aidâmes alors �  la défense de la place forte. Mon frère aîné, capitaine dans la milice, y fut tué. L’Anglais fut finalement repoussé. Ses troupes rembarquées, l’escadre leva l’ancre non sans avoir au préalable saccagé et incendié les quartiers et villages alentour dont celui où ma famille avait son logis. Mon père y laissa la vie dans sa défense.
Durant ce siège, j’eus  maintes occasions de m’entretenir  avec le capitaine Maupin. Il m’expliqua en quoi consistait l’état de flibustier et en vint �  me proposer de me joindre �  lui. Je refusais l’offre – bien que fort tenté par l’aventure - ne pouvant me résoudre �  abandonner mes Algonquins.
Deux années s’écoulèrent. Un jour, dans une fort méchante échauffourée contre des Iroquois, notre parti fut décimé. Plusieurs fois blessé, je parvins avec deux d’entre eux, blessés aussi, �  fuir le massacre. Au contraire de moi, ils ne survécurent pas. Pendant les mois de convalescence qui suivirent, je me remémorais souvent nos conversations avec Maupin.

Durant le rigoureux hiver qui suivit, ma mère mourut de pneumonie. Je me retrouvais seul héritier des biens familiaux. Lorsque je fus rétabli, ma décision était prise, j’allais me faire flibustier. Je vendis tout puis payais mon passage sur un vaisseau marchand qui devait se rendre �  Martinique.

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 06 Octobre 2011 à 18:04:58
Le voyage �  bord de la « Belle d’Aunis » fut assez long. J’en profitai pour m’initier �  l’état de marin. J’étais le seul �  avoir payé mon passage. Une dizaine d’autres n’en ayant pas les moyens, payaient en occupant des fonction �  bord et couchaient dans l’entrepont. Pour ma part, j’avais droit �  une cabine et je partageais la table du capitaine où l’on faisait bonne chair. Lui, m’initia �  la lecture de la carte, �  la conduite du vaisseau et �   la connaissance des étoiles.
Plus on descendait vers le Sud, plus la chaleur augmentait. Elle devint très forte surtout lorsque nous étions au vent arrière. J’allai devoir m’y accoutumer.

Parvenu �  Martinique, je passais quelques semaines dans la ville et surtout, dans l’intérieur des terres – souvenir de mon temps de coureur des bois chez les Iroquois et les Algonquins – car il  fallait que je m’imprègne de la mentalité des habitants et que je m’adapte �  ce temps, pire encore �  terre qu’en mer car s’y ajoute la moiteur de l’air. La faune et de la flore étaient aussi une nouveauté.
Je commençais ensuite �  fréquenter le port et les tavernes qui le bordait. Il me fallait un navire et un équipage. Je fis se répandre la rumeur sur mon origine de Canadien Français – mon parler amusait, car très différent du Français où de la langue d’Oc - et sur le fait que j’avais été élevé par des Iroquois. J’étais très jeune mais tous, �  voir mon corps déj�  couturé de cicatrices – surtout la gente féminine, qui en  fit courir le fait - comprirent que je n’étais pas un béjaune mais un soldat de métier de quelque expérience. J’obtins une entrevue  avec le Chevalier de Méricourt, gouverneur de l’île. Mes lettres d’introduction du Marquis de Verneuil et  du gouverneur de Montréal le Comte de la Bouère, ajouté �  mon titre  – avoir été officier durant le siège  Anglais sur Montréal m’avait ennobli et donné droit �  la particule et au titre d’Ecuyer -  y firent effet. C’est avec l’aide du gouverneur que je trouvais un sloop. Il n’était pas de première jeunesse certes mais le bois  était sain. For de cette acquisition, il ne me restait que mille écus. A ce propos, j’ai constaté que la valeur de la monnaie est ici sans commune mesure avec le Canada Français. Un service que j’aurai payé l� -bas deux sols était ,ici monnayé un écu. Quoique la monnaie usité soit la piastre d’argent où son équivalent or : le doublon où la pièce de huit (ces pièces pouvaient être séparées en deux où en huit quartiers pour la seconde ceci afin de pouvoir rendre la monnaie).
 
Deux mois après mon arrivée, avec soixante hommes dont un pilote – je me félicitais d’avoir trouvé ce dernier car je n’étais , loin s’en faut, pas encore un marin -  je mis �  la voile pour la première fois. Le gouverneur m’avait confié un pli secret �  remettre  �  son homologue �  Tobago. En route, nous croisâmes un flibot Français que nous saluâmes puis une frégate Espagnole et trois brigantins pirates dont nous éloignâmes prestement.

Le gouverneur de Tobago me pressa pour aller attaquer un navire croisant au large de Margarita et qui nuisait au trafic marchand. J’acceptais et m’y rendis. Après avoir pris la fuite  devant une corvette Anglaise, nous trouvâmes notre proie : une simple barge sous pavillon Anglais. Nous eûmes deux tués pendant l’approche et huit autres, dont mon charpentier, lors de l’abordage. Mon tir �  mitraille juste avant l’assaut coucha pour le compte douze des leurs. Nous avons coulé la barge après l’avoir pillé et massacré les sept survivants.

Je vendis le butin �  Margarita et recrutais les hommes que j’avais perdu. Le gouverneur des lieux me dépêcha devant Martinique pour y attaquer un navire. Sur la route, je croisai un flibot Français qui nous renseigna sur le navire que nous devions attaquer. Il s’agissait d’une pinasse battant pavillon Anglais. L’ayant trouvé nous nous en sommes emparés. Deux des nôtres furent tués pendant les tirs d’approche et six au cours de l’abordage. Les Godons eurent vingt trois morts et nous massacrâmes les deux survivants avant de couler leur navire.

En recrutant �  Martinique je trouvai un nouveau charpentier. Le Chevalier de Méricourt me confia mission d’attaquer un navire devant Saint Thomas.
Durant le trajet, nous nous attaquâmes �  une goélette armée en guerre battant pavillon noir. Elle portait quarante hommes et sept canons. L’affaire nous a coûté onze hommes dont mon pilote – ce dont je suis fort marri car je n’ai pas encore les compétences pour me passer d’un tel homme – et nous avons gardé cette goélette. Nous avons ensuite pris une pinasse Anglaise, but de notre mission. J’ai perdu huit hommes dans l’affaire.

Saint Thomas est une colonie Anglaise. Je demandai tout de même audience au gouverneur qui me reçu aimablement.  J’appréciai beaucoup de n’avoir pas �  passer par un truchement pour traduire ses paroles. Comme beaucoup parmi la noblesse d’Angleterre, il parlait fort bien notre langue. Nombreux en effet possèdent des terres en France, surtout dans la province de Guyenne qui fut longtemps en leur possession. Il me confia donc une dépêche pour Saba. J’ai complété mon équipage. Je n’ai pu trouver un nouveau pilote mais j’ai eu un maître d’équipage et un chirurgien.
Le gouverneur hollandais de Saba me confia mission d’attaquer un bâtiment Espagnol, une simple yole qui croisait au large de la Barbade. Nous déplorâmes quelques tués dont le chirurgien pour qui c’était le premier combat. Mes années passées avec les Iroquois et les Algonquins m’ont permis de connaître les simples et de savoir préparer potions, onguents et cataplasmes. Je savais réduire les fractures et soigner les blessures dues au combat mais n’avais pratiquer d amputation. Cela eut pu sauver quelques hommes ce jour l�   -bien que mon rôle de capitaine ne me laissât que peu de loisir aussitôt après un abordage d’autant que sous ces climats il faut agir de suite sinon la gangrène s’y met.        
Nous avons croisé un sloop Anglais peu avant les atterrages de Guadeloupe. Combat sans merci où nous déplorâmes vingt tués, les Godons n’eurent eu aucun survivant. La plus rude affaire depuis mes débuts �  la flibuste.
La cargaison était conséquente et après la vente �  Guadeloupe j’ai pu recruter un nouveau pilote. Le Chevalier de Méricourt me confia mission de débarrasser Barbade d’un navire ennemi croisant au large. Nous nous y rendîmes. Il s’agissait d’un flibot Hollandais moins chargé en canon que nous ne l’étions mais dont l’équipage était aussi nombreux que nous. Nous avons eu onze tués. Je décidais de ne pas massacrer les survivants et je parvins même �  en enrôler deux. Le flibot était chargé et nos cales étaient pleines.
La nuit et tout le jour qui suivirent, nous eûmes �  affronter une violente tempête. Nous en sortîmes épuisés quand, celle-ci apaisée, il fallut réparer les dégâts qu’avait subit « Algonquin ».

Les semaines qui suivirent nous permirent d’accomplir quelques missions. Nous fîmes escale �  Caracas, Rio de la Hacha, Bonaire, Cumana, pillant quelques yoles, barges où pinasses et fuyant lorsque l’affaire paraissait trop risquée.
A Saint Kitts, je sollicitai du Gouverneur une « Lettre de Marque » qu’il voulu bien m’accorder moyennant cependant quatre milles piastres qui n’allèrent sans doute pas emplir les caisses de la colonie.

Je repassai par Dominique où le gouverneur me chargea d’attaquer un sloop de guerre Anglais qui croisait devant Sainte Croix. Il était armé de quatorze canons et nous n'en avions que huit mais nous étions d'une vingtaine supérieur en nombre. Ses bordées furent très meurtrières – �  la suite de nos deux premieres bordées, lamentablement ratées, je fracassais le crâne du maître canonnier qui était �  ce moment ivre mort. Je m’étais félicité pourtant d’avoir réussi �  l’enrôlé �  Caracas - Nous avons tenté de fuir mais il était trop tard. Nos voiles déchiquetées ne nous donnaient plus assez d’aire pour gouverner et nous étions trop peu nombreux encore valides pour nous éloigner �  l’aviron, il fallu se rendre �  merci.
Notre goélette fut prise en remorque par notre vainqueur et je fus mis aux fers comme les neuf membres d’équipage restant en vie. Peut-être le capitaine n’aimait-il pas les Français mais je crois plutôt qu’ayant lui aussi beaucoup souffert de l’engagement, il craignait que nous parvenions �  nous emparer de son navire .

Il nous débarqua  �  Antigua. L� , le gouverneur Sir Arnold Bishop me proposa d’être « prisonnier sur parole ». Je serai libre de circuler �  ma convenance dans l’île si je donnai « ma parole de gentilhomme » de ne pas tenter d’en partir avant que je puisse être échangé contre un capitaine Anglais se trouvant dans une situation analogue dans une colonie française. Je la lui donnai.

A Martinique, je m’étais lié d’amitié avec le Chevalier de Méricourt curieux de faire connaissance avec ce Canadien Français qui plus est, élevé par des Iroquois – la rumeur lui étant bien sûre parvenue  - nous avons alors lié amitié au point qu’�  chacune de mes escales il m’offrait le gîte et le couvert. Lors de mon dernier passage, je lui avais laissé en dépôt notre butin soit plus de quarante milles piastres. Je lui envoyai une lettre lui faisant part de mon état présent. Une couple de semaine plus tard, j’en reçu la réponse. Il était fort marri de ma situation et se chargeait de la procédure d’ échange. Il me fit aussi parvenir des « lettres de change » pour la valeur de mon dépôt. Je pus m’installer confortablement dans une auberge car mon vainqueur et sans doute aussi le gouverneur Bishop s’étaient emparés de ma cargaison et des quarante trois milles piastres qui se trouvaient �  bord. Je fus en mesure de verser aux survivants de mon équipage, leur part de butin. Une coquette somme puisque chacun reçu près de mille sept cents piastres.
Je fis procéder par les ouvriers du chantier naval, aux réparations qu’exigeait « Algonquin », je l’équipai de huit canons de six livres – les miens ayant été confisqué par Sir Bishop, je l’avitaillai puis recrutai un nouvel équipage. Mes anciens compagnons, tout �  la joie de leurs parts de prise, me rejoignirent presque tous et je n’eu pas de difficultés �  recruter le complément tant ils avaient loué mes mérites dans les tavernes.              

    
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 08 Octobre 2011 à 15:28:25
  Quelques mois furent nécessaires avant que mon échange eut enfin lieu. Je me trouvais ainsi libéré de ma parole auprès du gouverneur Bishop. Mon navire était prêt et mon équipage au complet. Je quittai Antigua sans perdre de temps.
Nous avons mit le cap sur Martinique où je voulais aller remercier le Chevalier de Méricourt. Le surlendemain de notre départ, nous avons croisé un sloop Espagnol. Sauf la dernière bordée �  mitraille �  bout portant juste avant l’abordage, nos tirs n’ont pas été très efficaces.. Notre goélette a pas mal souffert pendant l’engagement et nous avons  déploré trente et un mort pour une cargaison qui ne valait pas un si lourd tribut. Il a fallu changer de cap et faire escale �  Nevis colonie anglaise où nous n’avons même pas pu vendre le maigre butin. J’ai cependant recruté un pilote.
Nous avons repris notre voyage vers Martinique où �  mon arrivée le Chevalier de Méricourt m’a fait fête. Nous y sommes restés deux semaines puis avons levé l’ancre pour Sainte Croix et de l�  vers  Port au Prince,  chaque fois comme porteur de dépêches, pillant en route  une pinasse hollandaise et quelques jours plus tard une goélette armée en guerre pavillon pirate flottant en tête de mât. Il y avait douze esclave �  bord que j’ai pu vendre un bon prix. Nous avons encore pris et pillés un sloop pirate et avons été amené ensuite �  faire une escale �  La Tortue pour compléter l’équipage. J’y ai recruté un chirurgien.

Notre navire commençant �  être trop connu dans ces eaux, je décidai d’en changer le nom. Nous le baptisâmes « Iroquoise » et l’équipage – et votre serviteur itou – eut droit �  une tournée de rhum pour l’occasion.
Le lendemain nous récupérâmes cinq naufragés. C’étaient des Français dont le navire, un flibot de commerce, avait fait naufrage huit jours plus tôt au large de La Tortue. Les pauvres n’avaient ni vivres ni eau depuis trois jours et sans nous n’auraient pas survécu deux jours de plus. Après les soins de notre chirurgien, il complèteraient opportunément notre équipage. 

    A Saint Barts, nous ne pûmes rien vendre.  Nous levâmes donc l’ancre sans nous attarder.
Une goélette de commerce Hollandaise fit les frais de notre rencontre et je libérai huit esclaves qu’elle avait �  son bord et qui se joignirent �  nous. Les hommes apprécièrent cette mansuétude et je crois que je réitèrerai �  l’avenir.
Ce fut quelques jours plus tard une goélette armée en guerre battant pavillon d’Espagne que nous croisâmes. Trente des nôtres y laissèrent la vie et notre vaisseau était si endommagé  - les idalgos avaient plus de canons - que nous nous transportâmes sur notre prise. Il fallu cependant faire escale �  Bonaire pour trouver de nouveaux compagnons bien que les seize esclaves pris �  bord de l’Espagnol nous eurent rejoint après que je leur ai offert leur liberté.
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 12 Octobre 2011 à 19:25:25
Lorsque j’eus complété mon équipage - et trouvé un canonnier et un chirurgien – je fis mettre le cap sur Sainte Croix. Sur le trajet, nous avons pillé un navire sans aucun équipage ni cadavre �  bord. Les hommes étaient terrifiés et j’ai du les menacer pour piller ce vaisseau. Il y avait �  bord un beau butin.
Le gouverneur de Sainte Croix me confie pour mission d’attaquer un navire Devant San Juan de Puerto Rico. Nous nous y sommes rendu mais il s’agissait d’une frégate et nous avons du fuir.
Le même jour, Nous nous sommes emparés d’une goélette de commerce espagnole. L�  encore un assez joli butin. Je vendis ma cargaison �  San Juan et pu recruter un pilote. Je demanda au gouverneur Espagnol de me confier une mission ce qu’il accepta et nous sommes sorti du port pour l’accomplir. A peine sommes nous sorti de la baie que nous rencontrâmes une goélettes hollandaise armée en guerre.
Las ! Je commis des erreurs tactiques sur le choix des boulets �  utiliser. Gréement et coque endommagés, je tentais de fuir mais le Frison était plus rapide. Mon canonnier et cinquante de mes hommes payèrent mon erreur de leur vie. Je dus amener mon pavillon.
Le Hollandais avait été très éprouvé et le capitaine Vermeulen pris la décision de passer une haussière et de remorquer « Iroquoise ». Je restais �  bord avec six de mes hommes, les sept autre autres ainsi que mon second, mon chirurgien et mon quartier-maître  étant transportés sur le « Vrijkeid ».
Sur « Iroquoise » sept Hollandais nous surveillaient. Je restais enfermé dans la grand-chambre quand mes hommes pouvaient monter prendre l’air sur le pont. Ils étaient ensuite descendus �  fond de cale quand je pouvais �  mon tour m’aérer. Lorsque je pus sortir je vis que les deux navires étaient sous gréements de fortune.

Le surlendemain nous approchions d’une côte  quand une frégate sortit de derrière un promontoire. L’arrivant ne tergiversa pas voyant l’état des goélettes et envoya ses couleurs. Un Français !
Le capitaine Vermeulen n’eut d’autre choix que de couper l’aussière de remorquage et de fuir, abandonnant sa prise et les sept hommes d’équipage qui la conduisait.
La frégate ne tenta pas de poursuivre le « Vrijkeid » - trop près du port et de ses défenses et mit en panne près de nous �  moins d’une encablure.
Les sept Hollandais me remirent leurs armes toute résistance étant inutile.
De la frégate, une chaloupe fut mise �  l’eau et nous accosta.
- Vous êtes vraiment les bienvenus messieurs » dis-je à celui qui commandait et qui montait à bord.
- Je suis le capitaine Robert de Beauchêne. Sans vôtre arrivée, j’allais goûter aux geôles hollandaises.
-   Et moi le capitaine Benjamin !! » lui répondit l’homme en franchissant lestement la lisse.
 -  On me connaît sous le nom de Scar. Ca fait plaisir d’aider un compatriote.
Scar prit Beauchêne par l’épaule  et l’invita �  le suivre sur sa frégate. Il en parcoururent le pont où quinze pièces menaçantes étaient rangées sur chaque bord. Dans la mâture les hommes de l’équipage s’activaient pour mettre �  la voile au plus tôt et profiter de la brise de terre qui se levait.
-   Les geôles hollandaises ! Ha par le diable j’y ai fait mes quartiers pendant une semaine » dit Scar d’un ton amical.
- C’est un endroit agréable mais autant l’éviter.
Il se mit soudain à hurler.
-   Je devais être pendu mais le destin en a décidé autrement ! » lança t’il comme un défi au ciel.
Son ton se radoucit aussitôt.
-   C’est ce qui explique ma rancune envers les Hollandais.
-   Je n’ai, quand �  moi, pas la même rancœur envers eux puisque vous venez de m’éviter d’avoir �  me rendre �  leur invitation cher capitaine Scar, mais …. je comprend fort bien vos raisons. »
Vous avez eu de la chance »
lança un homme large d’épaule et doté d’un cou de taureau qui approchait d’eux.
- Si ça avait été un navire espagnol  on l’aurait laissé passer !
-   Voici mon maître d’équipage, Thomas Bourpif !

Scar invita ensuite Beauchêne dans le carré. Deux hommes s’y trouvaient. L’un d’eux manipulait un « Bâton de Jacob ». le carré était assez spacieux mais décoré �  la va vite. Il était encombré d’instruments et d’armes.
Les deux capitaines burent quelques flacons de rhum en échangeant quelques propos mais Robert devina que le capitaine Scar avait hâte de s’éloigner de cette côte – l’agitation de l’équipage dans le gréement en était la preuve – il écourta le plus poliment possible les civilités.
-   Capitaine Scar, je souhaite rejoindre au plus vite un port, autre que hollandais il va de soi, pour réparer et compléter mon équipage. Comme vous le voyez, le Hollandais m’a pillé mais surtout �  fuit �  votre approche en emmenant mes officiers et la moitié de mes hommes survivants. Je vous suis redevable de mon navire capitaine. Croyez bien que je suis, ainsi que mon navire et mon épée, entièrement �  votre service. Où que vous soyez et pour quelques raison que ce soi, faîtes appel �  moi et je ferais tout pour vous rejoindre.
Robert fut raccompagné �  bord d’Iroquoise et les deux navires firent porter pour s’écarter.
De leur dunettes respectives, les deux hommes se saluèrent d’un large geste du chapeau pendant que les équipages se lançaient des hourras �  tue-tête.  

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 13 Octobre 2011 à 12:01:51
La Tortue ! Haut lieu de la Flibuste française.
Robert de Beauchêne y séjourna plusieurs semaines. « Iroquoise » avait besoin de nettoyer ses fonds – elle perdait beaucoup en vitesse du fait de la traînée d’algues accrochées sous la coque – et nécessitait de lourdes réparations (dont son mât de misaine fendu de l’étambrai et sur plus de deux toises). Il devrait aussi recruter pas mal d’hommes pour combler les pertes subies.

Il mit �  profit ce séjour pour visiter l’Ile. Il fut reçu en plusieurs occasions par le gouverneur, le sieur Bertrand d’Ogeron auprès de qui il s’enquit des capitaines Maupin et Scar mais tout deux étaient absent de la colonie. Il fit aussi la connaissance d’Alexandre Oexmelin, le célèbre chirurgien de la flibuste, qui fut un temps compagnon de bord de Scar. Grâce �  lui, Beauchêne trouva un chirurgien pour « Iroquoise ».

Prenant momentanément La Tortue comme base, Robert de Beauchêne fit une sortie poussant jusqu’au passage de Mona, route des navires venant et partant vers le vieux continent. Une goélette de commerce hollandaise, une pinasse pirate firent les frais de cette courte croisière. Les Hollandais se défendirent vaillamment (il n'y eut aucun survivant et "iroquoise" perdit vingt hommes dont son maître coq. Pendant l’abordage, le chirurgien avait reçu un coup de crosse �  la tempe et s’était écroulé. Ne pouvant se relever tant la presse était forte entre les deux équipages, il participa au combat en mordant les ennemis �  sa portée. Après que le carnage eut cessé, les hommes le surnommèrent « Croquefesse »  quoiqu’il jura que jamais il n’avait pu mordre si haut.
- Faux !  rétorqua l’un d’eux.
 Se retournant, il se déculotta,  et en fournit la preuve (ainsi que celle que les Hollandais ne furent pas les seuls victimes du chirurgien). Une étonnante et profonde morsure sur la fesse gauche confondit le chirurgien déclenchant l'hilarité de l'équipage qui, de fait, lui pardonna de n'avoir pas été en état de soigner leur camarades blessés ce qui eut peut-être eu pu en sauver quelques uns. Car Croquefesse fut assommé pour le compte avant la fin du combat. Personne �  bord ne demanda non plus �  ce que soient défroqués les corps des Hollandais qui jonchaient encore le pont.  
  

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 14 Octobre 2011 à 19:07:22
Bauchêne était accoudé �  la rambarde de la dunette et avait assisté �  la scène. Cachant mal l’envie qu’il avait d’en rire, il interpella le chirurgien qui devant la preuve de son méfait restait coit.

-   Monsieur Chabot. Où Croquefesse devrais-je dire ! N’y voyez pas offense de ma part mais cet alias me plait assez. Je vous serais infiniment gré, et toute la compagnie avec moi, si �  l’avenir vous vous absteniez de passer sur le pont ennemi. Outre que nous pouvons avoir besoin de vos talents après une chaude affaire, et vous ne pourriez en faire démonstration si vous étiez offensé comme ce jour d’hui … où totalement occis, nos céans y seraient très favorables. Monsieur Oexmelin m’a appris que vous aviez été un temps boucanier et que vous êtes un tireur redoutable. Nous allons mettre le cap sur Léogane. Je me propose de vous offrir un de ces fusils de boucanier qu’on fabrique près de Rouen (*) et qui me dit-on, n’ont pas d’équivalent de par le monde. Vous pourrez vous rendre infiniment utile en offensant les ennemis du Roy depuis la dunette où depuis les hunes pour peu que nous ayons un jour un vaisseau en possédant.

Les homme redoublèrent d’hilarité et le Quartier Maître proposa que le prix de l’arme soit pris sur le butin. Tous acquiescèrent.
Croquefesse donc, puisque tel était �  présent son nom, fit une large révérence en direction de Beauchêne puis de l’équipage. Après quoi il descendit avec sa victime pour la recoudre.    

(*) Authentique
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 17 Octobre 2011 à 12:25:45
12 Octobre.
Attaqué un flibot anglais aux atterrage de La Véga. Beaucoup trop de morts, dont notre Maître-canonnier et ce, pour un bien maigre butin.
Escale �  La Véga. Recruté un nouveau Maître canonnier.

13 Octobre.
Attaqué yole hollandaise. Longue chasse, perdu 3 hommes. Pour ainsi dire, pas de butin !

14 Octobre.
Attaqué brick anglais. Avons dû fuir devant l’efficacité de ses bordées. 47 tués dont notre Pilote.
Escale �  Léogane pour réparer et reconstituer un équipage.
Acheté un brigantin que j’ai baptisé « Narval ».  

 15 Octobre.
Première sortie en mer avec « Narval ».
Cap sur Saint Eustache. Rencontré flûte de commerce espagnole armée d’au moins 8 canons et ayant un équipage aussi nombreux que nous. Après une chasse et un long duel aux canons nous l’avons abordé et vaincu mais la note du boucher est lourde : 43 tués  dont notre Maître canonnier !
Aucun des 33 survivants Espagnols n’a accepté de se joindre �  nous. Laissé cette flûte repartir après l’avoir pillé. Libéré un esclave qui se trouvait �  bord et qui veut faire parti des nôtres. Mauvais marin sans doute mais il est bâti en Goliath. Il haï bien sûr les Espagnols et ceux-ci ont peur des noirs. Ce sera un bon flibustier pendant les abordages. Il porte un nom imprononçable avec des B, des W et des A. Nous décidons tous de l'appeler "Goliath".
Relâché �  Saint Eustache pour compléter mon équipage. Je n’ai pas trouvé de canonnier pour remplacer celui que nous avons perdu mais j’y ai recruté un second : Jean de Siorac. Il a déj�  beaucoup bourlingué, entre autre avec le Capitaine Maupin – dont il ne peut me donner de nouvelles - qui l’a surnommé « Le Baron » - il aurait vraiment ce titre  - Je suis fort aise de l’avoir �  bord où il aura pour tâche tout ce qui concerne l’organisation de la vie du bord ainsi que notre économie. Les hommes semblent l’apprécier et j’aime sa faconde de gascon.

16 Octobre.
Quitté Saint Eustache cap sur Sainte Croix. J’ai eu l’heureuse surprise d’y trouver la frégate du Capitaine Scar. Il n’était pas �  son bord, j’y ai donc déposé une invitation �  se rendre sur « Narval ». Je n’oublie pas que je lui suis grandement obligé.
Recruté un maître-canonnier, surnommé « Biscaye » pour ce qu’il est natif de cette région et ne tient pas �  être connu autrement que sous ce sobriquet - pour des raisons qui lui sont propres, affaires de cœur malheureuses, ai-je cru comprendre – qu’importe du moment qu’il se montre capable !
     En fait, c’est moi qui me suis rendu �  bord de "Vent de liberté" la frégate du capitaine Scar qui préférait cet accommodement �  celui de se rendre �  mon bord. Je n’ai pu qu’acquiescer, ne pouvant rien lui refuser, j’en suis pourtant quelque peu marri tant j’étais fier de pouvoir lui faire visiter « Narval ».
Nous avons vidé une bouteille de vin d’Espagne qu’on lui aurait « prêté �  long terme » comme il me l’a si joliment dit. Nous avons aussi bu un flacon d’Armagnac que j’avais apporté (mais j’avais du bourse déliée pour me le procurer).
Nous nous sommes quittés dans la plus franche cordialité.
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 17 Octobre 2011 à 22:08:45
Le soir même, j’avais obtenu d’être reçu en audience par le Gouverneur, le sieur Guillaume de Lescure me chargea de me rendre �  l’Est du canal de Floride où un sloop corsaire espagnol croisait avec quelques succès au point que le trafic de commerce allait devoir être interrompu tant que cette menace persisterait – il me rapportait l�  les craintes des planteurs, commerçants et armateurs de l’île - le gouverneur n’avait que mon navire de disponible. D’autres vaisseaux étaient bien présent mais il étaient de taille plus importante et avait d’autres projets les concernant. J’acceptais la mission et je fis mettre �  la voile le lendemain �  l’aube.

Malheur ! Ce sloop moins armé que nous, en canons comme en hommes, nous a défait. Plus rapide que « Narval » de beaucoup, il a virevolté autour de nous évitant nos bordées et nous offensant méchamment quand il était sur notre poupe. Je réussi �  l’aborder mais trop tard, nous manquions d’hommes et les Espagnols se sont battus comme de beaux diables. Pour la seconde fois je goûtais aux geôles espagnoles.

Croquefesse s’est montré aussi machiavélique qu’ingénieux.
A Trinidad de Cuba où nous avons été emmené, il a pris contact avec les docteurs de l’hôpital pour proposer son aide. Découvrant que les lieux étaient bondés de malades – une épidémie de fièvre quarte – il leurs proposa de soigner nos blessés et ceux de notre vainqueur �  bord de « Narval ». A la demande desdits docteurs, les autorités acquiescèrent. Elles décidèrent que nos douze marins valides –  LeBaron en était -  Il avait caché �  nos vainqueurs sa fonction de second -  resteraient �  bord aidant de jour �  réparer puis �  décharger nos cales et nos canons, le gouverneur ayant  sans doute l’intention de vendre Narval �  son profit. De nuit, ils seraient confinés dans l’entrepont, capots d’écoutilles condamnés et gardés par quatre soldats.
Croquefesse occupait ma cabine sous  le gaillard arrière, transformée en infirmerie. Cinq de nos hommes y étaient soignés dont Goliath qui avait été estourbi par la chute d'une poulie, ainsi que quatre marins espagnols. Croquefesse était libre d’aller et venir pour pouvoir aller prêter main forte �  ses confrères de l’hôpital.

Après deux semaines, les blessés étaient en bonne voie de guérison, presque valides. Croquefesse, une fin de journée et après que nos hommes furent enfermés, sorti de la grand-chambre et demanda aux sentinelles d’aller immédiatement quérir un médecin de la ville car il semblait que l’un de ces patient semblait avoir la peste !!! Il voulait confirmation de ses craintes auprès d’un confrère.
Effroi des sentinelles. Elles quittèrent le bord dans la plus grande précipitation et s’en furent dans la ville répandant partout la rumeur et semant la panique. Croquefesse avait administré un soporifique aux blessés espagnols, il libéra tous l’équipage qui sous la direction de LeBaron firent sortir le brigantin du port. Les canonniers des forts, soit qu’il soient l�  plus pour surveiller les entrées que les sorties, soit que la rumeur de peste leurs soit déj�  parvenue, ne tirèrent pas et « Narval » fut bientôt en haute mer.

LeBaron mouilla dans une petite crique �  quelques lieues de l�  . Avec Biscaye et cinq des nôtres parlant espagnol, il revinrent en ville où ils se firent embaucher qui comme journalier, qui comme portefaix. Il épièrent dix jours durant  les aller et venue de l’épouse et des deux filles du gouverneur. LeBaron lui, s’informait des habitudes de la famille auprès des gens de la maison du gouverneur qu’il abordait dans les échoppes du quartier.
Son choix se porta bientôt sur la fille cadette Dona Inès laquelle rendait visite deux fois la semaine, escortée d’une duègne et d’un valet, �  son frère sur la plantation d’indigo qu’il possédait au Nord de la ville.
L’enlèvement réussi aisément. Le valet fut relâché et chargé d’une missive pour le gouverneur. LeBaron libérerait Dona Inès le lendemain en échange du Capitaine Beauchêne. La duègne serait jusque l� , garante que la jeune fille ne serait ni molestée ni outragée. Si cet arrangement était refusé, LeBaron s’engageait �  ce que Dona Inès soit vendu dans un bordel Anglais (des hérétiques !). Il joignit �  sa lettre une camée et une mèche de cheveux de la demoiselle pour prouver qu’il l’a détenait.

L’échange eut lieu comme convenu, son Excellence n’osa pas tendre de traquenard qui eut mit la vie de sa chère fille en danger.
 Je retrouvais donc LeBaron, Biscaye et Croquefesse �  bord de « Narval » le soir même. Ils me contèrent l’aventure avec force flacons de rhum �  l’appui.
Croquefesse m’apprit entre deux lampées que LeBaron avait signé la missive au gouverneur de son vrai nom : Jean de Siorac Baron de Mespech. Je fis part �  ce dernier de la folie de son geste.
-   Capitaine, je suis déj�  connu, en France et ici, comme étant de la Réforme. Même sans cette affaire, je sais bien ce que leur « Casa de Inquisicion » me ferait subir. C’est pour cette raison que je m’étais fondu parmi l’équipage quand nous fûmes pris.  Alors Baste !

Le capitaine Beauchêne est depuis lors « Persona non grata » dans toutes les Colonies du Royaume d’Espagne et les têtes de sa personne, de LeBaron (Siorac) son second et de benoît Chabot (Croquefesse) son chirurgien, mises �  prix.
                                                
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 19 Octobre 2011 à 14:07:39
Beauchêne confia �  LeBaron, son second, la remise en état de « Caribou » avec l’aide du maître d’équipage Chambard et du charpentier enrôlé depuis peu. Quand �  lui, il quitta le bord pour effectuer la tournée des quelques échoppes que comptait Saint Eustache, son nouveau navire « Caribou » avait grandement besoin d’espars, rouleaux de toile �  voile , térébenthine ,peinture, étoupe, brai, cordages et poulies et tout ce dont pouvait avoir besoin pour naviguer et combattre, un vaisseau corsaire.  
Les deux premières qu’il visita étaient assez mal approvisionnées – mais il voulait les voir toutes avant d’effectuer le moindre achat afin d’en comparer les prix. LeBaron qui, étant de la Réforme était parcimonieux, serait satisfait d’apprendre que son capitaine tenait compte de ses avis - en la matière !  - Car pour ce qui est de la gaudriole, Beauchêne ne pourra jamais respecter les préceptes d’une telle religion.
Dans la troisième échoppe – il n’y en avait pas d’avantage �  Saint Eustache – se trouvait avant lui une cliente, chose rare dans un tel lieu. Jeune, belle et chose surprenante, habillée en homme ! En marin pour être précis. Un chemisier de calicot blanc, culotte et bottes noires avec en travers du buste un baudrier auquel pendait un sabre d’abordage. La taille fine était encore accentuée par un ceinturon dans lequel étaient passé un pistolet et une dague. Ses cheveux blonds, assez longs étaient réunis en catogan et coiffé d’un tricorne rouge empanaché de blanc.
Superbe !
Un commis aborda Beauchêne et le pria, en attendant que le maître de céans en ait terminé avec cette jeune femme, de visiter les entrepôts pour voir si ce qu'il cherchait était disponible. Les magasins étaient fort bien approvisionnés. Bauchêne ayant terminé son inspection, revint vers le bureau du négocient. La jeune femme était toujours l� . La porte ouverte, il ne pouvait faire autrement qu’entendre des bribes de la conversation. Tout �  coup, un mot éveilla son attention. Un nom plutôt : Scar !
La jeune femme prit, peu après, congé du marchand.
-   Au plaisir de vous revoir, Capitaine Saskia. » dit le gros marchand, homme  rougeaud �  l’aspect débonnaire.
Ainsi se dit Beauchêne, cette femme est capitaine ! Saperlipopette ! Qui plus est, elle connaît le capitaine Scar car c’est elle qui a prononcé ce nom.
 Elle sortit du bureau, il se mit en travers de l'étroit passage.
-   Mademoiselle … où devrais-je  dire : Capitaine Saskia !-   ?
Elle le détailla  de haut en bas, d’un regard quelque peu interrogateur voire … suspicieux.
Je suis le Capitaine Beauchêne. Pour - Je vous servir Mademoiselle. Veuillez pardonner mon outrecuidance mais je n’ai pu … ne pas entendre quelques mots que vous échangiez. Un nom que vous avez prononcé m’a interloqué. Vous connaissez donc le Capitaine Scar ?       


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 19 Octobre 2011 à 18:02:33
Alors qu'elle venait de libérer St Eustache d'un blocus espagnol qu'une goëlette de guerre imposait depuis déj�  5 jours, Saskia put librement vendre tous les biens dont les cales du Golven regorgeaient: plusieurs lingots d'argent, des fourrures, des objets précieux du continent... mais aussi de la toile ou du bois de superbe qualité pris dans les cales de ses prises précédentes et nombreuses, toutes exclusivement espagnoles. Il faut dire que ces derniers ont la main-mise sur le commerce du bois et des fibres de qualité pour la construction navale, ayant de fait des colonies continentales pouvant supporter une telle production et non des îles volcaniques où toute culture est une gageure.

Leo de Vries, l'unique marchand digne de ce nom �  St Eustache, avait bien tenté d'acheter au rabais ses marchandises, pensant qu'elle devait appareiller au plus vite, probablement cahrgée d'une autre mission au nom des Provinces Unies, comme cela a été le cas ce dernier mois. Mais Saskia, en bonne marchande, ne s'y laissa pas prendre et sut reprendre l'avantage dans cette dure négociation. Le temps était en sa faveur, et la qualité des biens qu'ell lui proposait étaient un atout majeur.

Alors que Leo accepte enfin d'ouvrir sa bourse et donner �  la capitaine corsaire pas moins de 25 000 florins, elle fait mettre de côté deux pans de la meilleure toile ainsi que deux arpents de bois tropical qu'elle venait de lui vendre, �  destination du capitaine Scar, lors de son prochain passage. Cadeau d'une amie. Le marchand ne put refuser, même si Scar n'était pas des plus apprécié dans les colonies néerlandaises tellement il eut coulé de navires... mais Leo de Vries savait qu'il était dangereux de mécontenter le capitaine Saskia, surtout après qu'elle ait cassé le blocus espagnol.

Sur le chemin de la sortie, un jeune homme lui barre la route. Un Français �  n'en pas douter. Moustache fine et langage châtié, se mariant fort bien avec son apparence soignée, portant un tricorne sur la tête, une redingote, des manches très larges, des bas et des chaussures �  bout carré dernier cri. Un officier de la Royale, �  peu de chose prêt. On y devine un homme réfléchi, sérieux... peut-être un peu coincé.

Il se présenta: capitaine Beauchêne... qui semble en vouloir �  Scar. Alors qu'il prononce son nom, on sent une position défensive de la jeune femme, alors que plusieurs souvenirs liés �  ce nom de heurtent dans son esprit. Leur première rencontre, le dîner aux chandelles �  l'arrière du Golven, son improbablent libération des geôles espagnoles de La Vega par ce diable de Scar au nez et �  la barbe des Espagnols... et les conditions dans lesquelles elle a pu obtenir celle de Scar, détenu par le gouverneur de Curaçao, Matthias Beck. Ce dernier souvenir, douloureux et humiliant, lui fit mordre la lèvre inférieure de colère contenue.

Elle répond alors �  l'homme sur un ton glacial et suspicieux, la main sur le pommeau de son sabre. Après tout, cet homme pourrait en vouloir �  ce forban de Scar. Qui sait ce qu'il a encore pu faire comme frasques? On parle souvent de lui ces derniers temps... notamment d'un enlèvement d'une superbe femme. La fille du gouverneur de Santo Domingues, selon certains. Connaissant le lascar, la fille n'a pas dû être remise vierge au commanditaire, le gouverneur d'Orégon... un Français... et ce Beauchêne a tout de l'officier mercenaire!

Prudence...


Qui ne le connait pas? Ami ou ennemi, ce lascar ne peut guère passer inaperçu... surtout pour mes compatriotes chez qui il a fait de nombreuses victimes, échappant �  la potence par miracle �  Curaçao il y a peu de temps. Demander après lui en terre néerlandaise est peu avisé, capitaine Beauchêne, car même si Scar n'est pas encore activement recherché par les gouverneurs de mon pays, par trop occupés �  harceler l'Espagnol, cela arrivera bien tôt ou tard.

Allons... allez droit au but... que lui voulez vous? Le chercheriez vous pour vous venger d'un troussage ou la chose serait plus sérieuse?
 


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 20 Octobre 2011 à 12:05:47
- Que non point ! Vous vous méprenez �  mon sujet Capitaine Saskia. Je suis en fait grandement redevable au Capitaine Scar. Il y a peu, il m'a permis d'éviter d'avoir �  me rendre �  l'invitation forcée et d'une durée indéterminée que me faisait un gouverneur. Vous entendant prononcer son nom, j'osais espérer que vous aviez de lui des nouvelles récentes.    


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 20 Octobre 2011 à 14:50:02
Saskia reste vigilante bien que sur ses gardes. Les Français sont beaux parleurs, c'est chose connue. Mais quelque chose la poussait en son for intérieur �  croire cet homme, allez savoir pourquoi. Elle décide donc de ruser afin de tester la véracité des dires de ce Beauchêne...

Ha bon? Ainsi ce forban vous a providentiellement sauvé? Voil�  qui est intéressant... élan de sympathie pour un compatriote peut-être.

Elle désigne d'un geste les pans de toiles et arpents de bois qu'elle lui a réservé.

Voici la raison pour laquelle son nom a été prononcé: je lui ai fait mettre de côté ceci, que je viens de saisir �  bord d'une goëlette espagnole, celle-l�  même qui effectuait le blocus de St Eustache que je viens de casser, par la grâce de Dieu. Des matérieux d'excellente qualité, comme vous pouvez le constater.

Elle revient à Beauchêne, la voix désormais beaucoup moins glaciale

Mon équipage et mon navire on été fortement éprouvé, mais nous sommes arrivés �  manoeuvrer et le maintenir en échec, tirant en limite de portée de nos couleuvrines. Tactique certes laborieuse, coûteuse en boulets et demandant de bonnes capacités manoeuvrières, mais elle a porté ses fruits.

Dites moi... seriez vous sur le départ, ou accepteriez vous de venir passer la nuit sur mon domaine? Le fait est que j'ai pu acquérir quelques hectares de terre sur cette île, dans un "fond" verdoyant, et que je m'apprêtait �  y retourner. Un peu de compagnie venant d'un homme aux bonnes manières me changera grandement.

Et puis vous pourriez alors en profiter pour me conter votre rencontre avec ce diable d'homme qu'est Scar! Me feriez vous ce plaisir, capitaine?

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 20 Octobre 2011 à 18:58:40
- Ma foi, il me faut passer commande auprès de ce marchand le sieur Léo de Vries, sinon mon équipage se trouvera désoeuvré et mon second sera bien marri de ne pouvoir les mettre �  l'ouvrage pour remettre en état notre sloop. En outre capitaine, je présume que votre plantation se trouve en dehors de la ville. je dois �  ma honte vous avouer que je sui un très piètre cavalier. En faite, j'ai appris �  monter dans ma prime enfance mais depuis ...

Beauchêne avait suspendu sa phrase d'un air assez penaud.
 
- J'ai été longtemps "Courreur des bois" et je suis �  présent marin. je n'ai eu que bien peu l'occasion de monter en selle depuis. Aussi vous prierai-je de ne point vous moquer, ni de ma façon ni de l'allure de mon équipage. Si telle sont vos intentions, c'est avec grand plaisir que j'accepte votre invitation.  


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 20 Octobre 2011 à 22:08:39
Saskia rit alors de bon coeur.

HA HA HA! Capitaine Beauchêne, l'on n'accède �  mon domaine que par la mer! IL ne pourrait en être autrement pour un capitaine corsaire, marchande de surcroit! Allons, venez avec moi, nous appareillerons dans une heure et atteindrons Golvengeval dans trois heures au pire.

Au fait... sauriez vous jouer aux échecs? Je n'ai malheureusement aucune adversaire digne de ce nom au domaine, et si par chance vous étiez adepte de ce jeu, notamment de sa forme la plus récente avec eschés de la dame et roque... je serais fortement intéressée par une partie. J'ai notamment chez moi un superbe jeu en ivoire et ébène "emprunté" �  un capitaine de galion de commerce espagnol. Un homme au goût certain qui n'a pas eu de chance de croiser mon sloop des Bermudes et d'en sous-estimer la létalité pour peu qu'on sache le maneouvrer correctement.


Elle ressort alors, tête haute.

Dans une heure sur les quais, capitaine. A tout de suite!
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 21 Octobre 2011 à 18:59:06
Saskia volta et s’en fut, son rire résonnant dans l’étroit couloir de l’échoppe du sieur Léo de Vries.
Beauchêne eut un large sourire. Il était assez satisfait de lui même : il l’avait fait rire.
Alors qu’au début de leur entretien, elle avait été sur la défensive.
Non ! Agressive ! C’est le mot qui convenait.

De fait, il n’était pas aussi mauvais cavalier qu’il l’avait prétendu avec son faux air penaud.
Il savait monter, sans plus … mais bien mieux que beaucoup, surtout parmi les gens de mer dont la plupart n’avaient chevauchés que l’élément liquide et des femmes. Quoique pour ces dernières … les bourgeois, les terriens en général, prétendaient que le matelotage entre marins n’était qu’un doux euphémisme cachant en fait des pratiques sodomites. Les sots !  

Il la suivi des yeux jusqu'�  ce qu’elle disparaisse �  sa vue.

-   Sacré beau brin de fille. »  Pensa-t-il. - Un port de tête adorable. Le dos droit, les épaules rejetées en arrière – les deux mettant en valeur des rondeurs …  Et du caractère ! Une battante �  n’en pas douter.

Beauchêne secoua la tête comme pour chasser cette délectable vision. Il entra dans le bureau de Léo de Vries. Il était temps de penser �  ses devoirs de capitaine d’un navire  flibustier.
Il commanda au marchand ce dont « Caribou » avait besoin. D’avantage même car il choyait son navire.
Il ne lui restait que peu de temps avant que l’heure ne soit écoulée. Il fut de retour �  son bord.

-   Mon cher LeBaron » à l’adresse de son second - envoyez une équipe avec un homme de confiance chez Léo de Vries. Il a son échoppe et ses entrepôts dans la ruelle située entre le bout du quai et les fortifications de la batterie basse. Voil�  la liste de ce que j’ai acheté, vérifiez �  leur retour que rien ne manque, le larron fait dans la qualité mais ses prix sont assez élevés et je n’ai pas un capitaine Saskia pour m’offrir de la toile �  voile et des espars.
-   Je ne comprend pas capitaine. Qui est ce capitaine Saskia ?

-   Oh rien ! Je vous expliquerai plus tard. Au fait, que l’équipe que vous enverrez chez ce Léo de Vries loue les services d’un charretier. Il y a pas mal �  transporter �  bord. Et je vais m’absenter pour …. En fait, je n’en sais fichtre rien. Ne vous inquiétez pas même si vous ne me voyez pas de plusieurs jours. Vous n’auriez pas remarqué un sloop … « Golven » je crois ? Sinon voyez avec les hommes si l’un d’eux sait où il est accosté, je descend dans la cabine me changer.
-   Vous changer Capitaine ? Vous aviez demandé une audience �  son Excellence le gouverneur ?

-   Mieux que ça mon cher ! » Lança Beauchêne par dessus l’épaule en dévalant l’échelle du panneau d’écoutille.
-    ?
Il réapparu avant que LeBaron eut fait partir l’équipe chez Léo de Vries. Chemise de fine batiste �  jabot et manches bordées de dentelle, tunique de fin velours vert passementée de fils d’argent, tricorne bordé de galons et de franges en fils d’argent également et souliers �  boucles, l�  encore en argent.
Les hommes présents sur le pont le regardèrent bouches bées. Occupés �  vérifier la liure de beaupré, Pierre « Belle gueule » dit �  l’aide bosco :
-   Mazette ! Y’a une femme l�  dessous, j’te l’dit compagnon.
-   Alors c’est une Lady »
répondit « la Bigorre ».
-   Ici on dit pas Lady, c’est une colonie des Provinces Unies.
-   Et comment y disent les Hollandais ?
-   Ben … j’sais pas. Moi j’fréquente que les filles de chez  la Margot.
-   Et où c’est-y ça chez la Margot ?

-   L�  Bas ! »   dit la Bigorre en tendant le bras vers les bas fond de la cité.
-   T’as déj�  trouvé le temps de repérer les lieux ?
-   Quand on me pince le nez y’a pas encore du lait qui coule. Moi j’ai bourlingué et je suis déj�  passé partout.
Pendant ce temps, après avoir obtenu de son second la position de « Golven », Beauchêne s’y rendit – ce n’était que cinq navires plus loin, le long de l’unique quai – et il y fut rapidement suant presque dans ces beaux atours. Le Capitaine Saskia avait parlé  de quelques heures de mer et l’air du large lui ferait le plus grand bien.
- Vêtu comme pour assister au « Lever du Roy » que peut bien aller faire Robert �  bord de ce « Golven ». pensa LeBaron en voyant son capitaine s’éloigner.                
  
   


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 24 Octobre 2011 à 23:40:56
Alors que Robert Beauchêne approchait du Golven, il put aisément voir Saskia s'activer �  préparer le départ de son navire. Elle était restée telle qu'il l'avait vue l'heure d'avant, habillée en homme, les formes généreuses en plus. Il put admirer sa manière autoritaire mais douce �  la fois de gérer son équipage, main de fer dans gant de velour, mais toujous motivée par une profonde volonté de protéger ceux qui l'entourent.

Notamment un petit mousse au bonnet rouge retombant sur son oreille droite, comme en sont équipés les mousses espagnols qui, �  la demande de Saskia, accourt vers Beauchêne.


- La signora Peettante, elle dire qué signor Francese bienvenou et qué nu boord.

Le mélange d'Espagnol Français et Néerlandais dans le language du garçon fit sourire le corsaire Français alors que le petit mousse lui indiquait avec force gestes la passerelle pour monter sur le Golven. Alors qu'il prend pied sur le frèle esquif, Saskia vient �  lui dans une démarche chaloupée, le contemplant de haut en bas et de bas en haut avec un sourire en coin.

- Mij God! Que vous voil�  bien affublé, capitaine! Soyez le bienvenu �  bord du Golven! Nous appareillons dès maintenant, car le temps presse si nous voulons ariver �  govengeval avant le tombée de la nuit. La nuit dans les tropiques est traitresse car tombant sur les coups de sept heures du soir sans crier gare, en moins d'une demie-heure, chose bien étrange pour ceux qui ont vécu au pays! Allons venez vous installer �  la barre de mon modeste sloop... nous sommes �  équipage réduit, juste quatre, la grande majorité de mes hommes passant la nuit et probablement les deux ou trois suivantes dans les tavernes et bordels du port. Aussi devrai-je affaler, choquer et hisser comme un simple matelot si nous voulons arriver �  bon port!

Elle fit une légère courbette, ironique.

- Si notre capitaine vuet bien se donner la peine... je le guiderai jusqu'à bon port!

(http://farm2.static.flickr.com/1208/551415164_2b11e1b67a.jpg)

Et le Golven de prendre paisiblement la mer, longeant sa côte caraïbe sous le soleil couchant de St Eustache, portée par une brise légère. Deux heures plus tard, le Golven lançait l'ancre dans une baie sombre et une chaloupe fut avancée pour que l'équipage �  son complet, Beauchêne compris, puissent accoster �  un quai sommaire où des esclaves se bousculaient pour accueillir leur maîtresse, l'appelant "Peettante" et souriant de leurs belles dents blanches visibles comme autant de phares éclatants dans le noir. Voyant Beauchène s'interroger sur ce mot incunnu de lui, saskia lui dit alors sobrement:

- "Peettante", cela veut dire "marraine" en Néerlandais... un surnom qu'ils m'ont donné.

A l'arrivée �  terre, les lourdes senteurs de la nuit emplissent l'air, mélanges de l'acidité de de la terre noire et riche, et de la moiteur de la végétation luxuriante. L'aire est rempli de sons propres �  cette région du monde. Le chant des "genbo" (petites chauves-souris insectores chassant �  tire d'aile �  la tombée de la nuit, remplissant l'air de leur cris aigus), des "kabri d'bwa" (grosses sauterelles sont le bruit ressemble au bêlement d'un cabri) et des petites grenouilles. Une nuit assourdissante, bien loin de la quiétude des nuits en mer.

bruit de la nuit  (http://sd-1.archive-host.com/membres/playlist/8986965021111749/jungle.mp3)

Alors qu'une nuée de gens s'affairent, Saskia guide son invité jusqu'�  une maison de type colonial perdue au milieu de la végétation. Il fait noir, et l'on ne peut savoir ce qu'il y a au del�  de la luxuriante végétation qui les entoure, mais Beauchêne a le sentiment que le terrain est plus vaste qu'il n'y parait.


(http://www.reve-lemanique.ch/Prix/Martinique/SF1.jpg)

Elle désigne alors un fauteuil et une table sur la terrasse entourant la maison.

- Asseyez vous, capitaine... mes gens vont vous servir quelque chose �  boire pour vous faire patienter. Je vais, pour ma part, changer de peau avant de vous rejoindre!

Beauchêne peut entendre, malgré le bruit assourdissant de cette nuit antillaise, le bruit caractéristique des vêtements glissant au sol et celui du bac où Saskia s'est plongé avec délice, juste derrière la paroi qui les sépare. Des jeunes femmes de toutes couleurs, certaines portant leur enfant sur le dos, lui servant raffraichissements et mets �  grignotter tandis qu'elle pratique ses abblutions.

- Préparez donc le jeu d'échecs, capitaine Beauchêne, lui lance t'elle à travers la paroi, j'arrive sous peu. Une pipe de tabac et un thé vous tenteraient ils?  


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 25 Octobre 2011 à 12:44:15
Les deux heures qu’avait duré la traversée jusqu’�  Golvengeval, �  bord de l’embarcation de Saskia, n’avaient pas autorisé de conversation. La présence de l’équipage réduit et du même fait, l’obligation que Saskia avait de manœuvrer elle même. Robert apprécia simplement la fraîcheur de l’air du large, l’approche de la côte et le spectacle grandiose de la nuit tombant brutalement, comme chaque fois et sans jamais lasser, sous ces latitudes.

Golvengeval. Ils prirent pied sur le petit débarcadère et s’engagèrent sur une belle allée en direction de l’habitation principale presque noyée sous les frondaisons. Toujours sans parler, car après le relatif silence en mer – relatif du fait qu'il y avait le bruissement de l’eau le long du bordé,  le sifflement du vent dans le gréement, les craquements du bois qui travaillait – ici, c’était un formidable concert de tout les animaux et insectes des nuits tropicales.

Saskia installa Robert sous une vaste varangue puis entra dans la demeure. Il retira son tricorne et son baudrier. Il ne portait pas son lourd sabre d’abordage mais une fine rapière en acier de Tolède �  lame damasquinée, don - �  son corps défendant - d’un capitaine Espagnol. Il  les remis �  une jolie et très jeune petite soubrette noire comme l’ébène qui les pris avec un sourire enjôleur. Robert avait compris qu’ici, nul n’était vraiment esclave. Elle n'arait pas été appelée "Peettante" si tel n'avait pas été le cas.
Les lourdes et capiteuses effluves de la terre et de la végétation luxuriante envahissaient d'avantage encore l’air maintenant que la nuit s’était faite. Le bruissement qu’il perçut derrière la mince cloison de bois malgré les trilles lancinantes de la faune, ne laissèrent pas Robert indifférant.
Il avait conscience  - de manière encore diffuse certes - qu’il vivait un moment rare, hors du temps.
 Saskia avait, pensa t-il, plusieurs facettes. Le Capitaine capable de diriger un navire et de mener un équipage au combat, d’une part. Le terrible flibustier (au grand dam des Espagnols surtout), d’autre part. Mais aussi, la propriétaire d’un assez vaste domaine où l’esclavage était quasi banni. Enfin :   La   Femme  !
A l’évidence peu, et peut-être moins encore, connaissait cette face l� .
Robert ne voulut rien risquer qui puisse rompre le charme ambiant. Tournant la tête en direction de la voix de Saskia - et d’où il avait perçu les affolants bruissements et maintenant des bruits d’ablutions  -  il répondit avec autant d’équanimité qu’il fut capable :
-   J’accepte avec plaisir fumer une pipe et jouer aux échecs. Et … Va pour le thé, cependant un verre de vin aurait eu d’avantage ma faveur.  

Avisant l'échiquier, il prépara le jeu, admirant chaque pièce avant de la déposer sur sa case.
 
-  Magnifique jeu que vous avez l� . Les pièces sont joliments ouvragées. Un cadeau ?    
 
Cette question posée d'un air un peu goguenard car il en pressantait la provenance.  


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 25 Octobre 2011 à 14:44:31
Un rire contenu se fit alors entendre de l'autre côté de la paroi.

- On peut dire ainsi. Le capitaine espagnol du galion de commerce que je ramenais alors �  Curaçao était un homme charmant mais très empêtré dans ses considérations de l'honneur. Un jeune officier fraichement émoulu de son "escuela naval militar". Son problème était d'être toujours en vie, comme les trente autres membres de son équipage, et la dizaine d'autres qui a spontanément rejoint nos rangs, comblant par l� -même nos pertes du jour. Les cales du Golven étaient pleine et 3000 Florins m'attendaient �  bon port. Une bonne journée, en somme...

Mais ce triste sire ne voyait que déshonneur au fait d'être tombé dans les mains d'un corsaire commandant un sloop des Bermudes. Néerlandais de surcroit. Et femme, qui plus est! Trop de déshonneur pour ce jeune homme fragile prisonnier �  mon bord tandis que son navire allait être livré au gouverneur de Curaçao, le très rigide et puritain Matthias Beck...


Un silence se fait avant qu'elle ne continue son récit, continuant ses abblutions.

- Il devait nourrir quelque secret espoir que nous puissions croiser la route d'un navire espagnol trop fort pour notre sloop et que nous l'abandonneions alors, lui et son galion, afin de sauver notre peau. Chose probable si prêt du continent sud Américain. Mais lorsqu'il vit les côtés très caractéristiques de Curaçao, son espoir s'envola aussi vite que son désir de vivre. Aussi me demanda t'il de mettre fin �  ses jours, ce que je refusai sur-le-champ. Sa capture allait me rapporter une rpime non négligeable, et je ne suis pas fole au point de laisser un tel poisson m'échapper alors que l'or de la récompense pour sa capture sonnait déj�  �  mes oreilles.

"Je peux vous dédommager", m'a t'il alors dit de but en blanc.

D'abord intriguée, je lui ris au nez, car s'il avait quelque richesse, celle-ci était désormais dans mes cales... ce �  quoi il répliqua sans se démonter qu'il possédait un jeu d'échec unique en ivoire et ébène, caché dans une trappe secrète de son galion... et qu'il m'échangeait ce jeu contre la possibilité d'en finir dignement. Un jeu offert par son père avant son départ d'Espagne, un dignitaire propre du roi.

J'avoue avoir eu pitié de lui sur le moment, souhaitant qu'il n'ait pas eu �  tomber dans mes griffes et que par quelque magie, il ait pu m'échapper. Voire mourir au combat. Mais voil� , la réalité était toute autre, et ce jeune homme m'échangeait un trésor contre une mort digne.


Saskia, continuant son récit, sort de son baquet, aidée par ses servantes silencieuses mais bien présentes.

- J'acceptai alors, envoyant Hubrecht, mon second, chercher le jeu en question dans la cachette dont le jeune officier me confia l'existence. Quelques minutes plus tard, Hubrecht me faisait un signe depuis le galion captif. Je devais donc �  mon tour ne point me dédire. Je lui déliai alors les mains et lui remis mon pistolet chargé. Il le pris sans trembler ni même essayer de retourner l'arme contre moi. Puis il se tira une balle en pleine tête devant ses hommes restés sur le galion désormais sur notre bordée babord, avant de tomber �  l'eau pour y disparaître �  jamais.

Elle fit alors son apparition, les cheveux lâches bien que toujours mouillés, vêtue d'une robe simple mettant ses formes généreuses en valeur. Un sentiment de fraîcheur éname alors d'elle, de simplicité et de franchise... mais également de fragilité, elle qui n'arbore plus son sabre d'abordage et ses habits d'homme. Elle s'assoit alors devant Robert beauchêne, troublante dans son attitude androgyne.

- Meisjes! Breng twee pijpen, onze beste tabak, Franse wijn en thee! lança t'elle sans quitter le Français du regard. Un regard brûlant et réservé �  la fois.

- Ce jeu �  une histoire. Une histoire tragique. Et chaque fois que j'y joue, je repense �  ce jeune homme, me disant que je n'aurais peut-être pas sa force de caractère le jour où les Espagnols auront enfin l'occasion de se venger de moi et de mes commanditaires.

Une jeune femme de type amazonien arrive alors, bébé dans le dos, apportant deux longues pipes, du tabac, une bouteille de vin effilée assurément provenant de Bordeaux au vu de sa forme bien caractéristique, et une théière fumante. D'abord surpris par ce type physique désormais peu courant dans les petites Antilles, Beauchêne se remémore alors qu'il y avait, il y a encore peu, un traffic d'esclaves provenant du Brésil que les Portugais revendaient �  bas prix �  l'Espagne et aux Provinves Unies. La provenance de celle-ci ne laisse donc aucun doute. Elle pose délicatement le tout sur la table et sert sa maîtresse avec déférence. Son bébé se réveille alors et se met �  crier, visiblement contrarié d'avoir été ainsi dérangé, ce qui fait sourire tendrement la fière corsaire.

Elle bourre alors sa pipe lentement, laissant son thé infuser tandis que la servante, ondulant du corps pour bercer son petit, verse dans le verre de Beauchêne un vin rouge capiteux, s'harmonisant assez bien avec les effluves du lieu en cette soirée.


- A vous le premier coup, mon cher... honneur aux invités! lance t'elle alors, lui montrant l'échiquier d'un geste large.

(http://fc00.deviantart.net/fs41/i/2009/018/7/5/chess_by_twilight_creations.jpg)

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 27 Octobre 2011 à 13:14:48
Le premier coup !
Beauchêne décida de le jouer – mais peut-être pas où l’y invitait son hôtesse. Quoi que ? Il n’était pas entièrement convaincu qu’il n’y ait pas eu une allusion. Bref ! Il se lança dans une farce, ces petites pièces en un acte qui se jouent parfois au théâtre.
Il glissa les fesses pour s’enfoncer profondément dans son fauteuil, les épaules presque �  hauteur des genoux. Il porta une main �  son cœur, grimaça comme sous l’emprise des affres d’une violente douleur. D’une voix geignarde mais avec l’emphase d’un avocat plaidant :

-   Haaargh ! Le premier coup pour moi me dit-elle ! Ho la rouée, la fieffée rusée ! Car voil�  un moment déj�  qu’elle l’a joué ce premier coup.

Pointant un doigt accusateur et tremblant vers Saskia.

-   Elle l’a joué lorsqu’elle s’est présentée devant moi dans cette vêture !

Il surveillait, les yeux plissés par sa grimace, la réaction de Saskia. Un instant interloquée puis comprenant, elle commençait �  sourire. Il continua sa pantomime.

-   Le coup n’est pas fatal …je pourrai cependant y succomber avant qu’il soit longtemps. Je dois derechef prendre médecine.

S’appuyant d’un avant bras �  un accoudoir du fauteuil, il se redressa �  demi.

-   Voyons ce que nous avons là. » reprit-il en balayant du regard ce qui se trouvait sur la
 table basse �  ses côtés. Il prit le vin qu’on venait de lui servir, le porta �  ses lèvres. Il fit un bruit de succion comme certains lorsqu’ils portent en bouche une cuiller de potage … après quoi il en bu vraiment une bonne lampée.

-   Ah le sublime Elixir !
-   Cependant ce breuvage présente des effets pervers, Outre qu’il échauffe l’esprit, il donne la fièvre �  qui ne l’a et la fait dangereusement monter – ce qui est le cas – �  qui ne l’a point encore ! Il me faut en user avec modération.


L’indienne qui portait son enfant, bras tendu en suspend dans sa direction, lui présentait depuis le début de sa tirade, une pipe en terre cuite. Le fourneau en contenait déj�  du tabac mais la pipe n’était pas allumée.
Comprenait-elle le français ? Où son instinct lui faisait-il deviner quel genre de partie jouait Beauchêne ? Il ne saurait dire. Elle montrait un sourire mais un peu figé. Saskia elle, souriait franchement. Il poursuivit donc.

-   Ah, voilà la panacée ! Elle soulage de bien des maux : L’angoisse, la faim, le froid.

Il fit mine d’en tirer quelques bouffées qu’il soufflait avec extase.

-   L’effet en est cependant bien éphémère et ne saurait m’apaiser longtemps. Mais baste ! Que faire d’autre pour apaiser le mal qui me ronge �  présent ? N'y a t-il point un doct savant pour traiter ma blessure, et demeurant assez proche, car mon état ne peut que s'agraver c'est chose sûre.

Sans transition, il se redressa dans son fauteuil, cessa sa grimace. Un bref regard sur Saskia. Il lui sembla qu’elle se retenait de pouffer de rire.
Il fit pivoter l’échiquier pour avoir les pièces blanches devant lui, du bout des doigt il saisit le pion du Roi et l’avança de deux cases.
Si sa prestation était un coup d’estoc, il frappa cette fois de taille – mais  d’un coup atténué, comme porté du plat de la lame – il passa au tutoiement.

- A toi de jouer Saskia !  
   


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 27 Octobre 2011 à 14:21:37
La fantaisie du Français toucha la Néerlandaise au coeur. Direct. Fin bretteur �  l'intelligence aigüe que ce Robert Beauchêne, trouvant en un clin d'oeil la faille dans l'armure de la plantureuse femme corsaire, décelant le jeu de séduction, le dénonçant avec brio et prenant donc la main, alors que l'échiquier ne devenait plus que la concrétisation du jeu subtil et intrusif des deux partenaires. Une négociatrice et un beau parleur de haut vol. Moment rare de subtilité et d'intensité.

Amusée et séduite, Saskia oublie l'espace de cet entretien combien elle a souffert depuis qu'elle a conquis sa liberté, fuyant �  bord du Golven un mariage arrangé par son père avec un riche commerçant de son pays ainsi qu'une vie paysible mais mortellement ennuyeuse. Elle oublie ses ennemis agonisant �  ses pieds et ses amis dans ses bras, le sang recouvrant ses vêtements alors que son équipage tombait �  La Vega �  cause de sa haine aveugle de l'Espagnol, son emprisonnement des mois durant dans les geôles de La Vega, mais aussi le prix fort élevé qu'elle a dû payer pour que Scar ne se balance pas au bout d'une corde �  Curaçao. Tout ce qui fait de sa vie une épreuve permanente. Un choix souvent douloureux.

Tout cela semble désormais bien loin, alors qu'elle boit les paroles de Robert et redevient femme, et non corsaire affublée de vêtements masculins, cherchant �  se faire respecter par les hommes de son bord en ne montrant aucune faille, aucune faiblesse.


- Voil�  bien un coup fort original... le roi se permettrait-il des choses qui ne lui sont point admises en temps normal? Le voil�  bien empressé d'aller se faire manger...

Le ton était donné. D'un geste simple, elle congédie la servante amazonienne qui s'en va prestement en riant sous cape, berçant le bébé qui avait cessé ses pleurs pour retomber dans les bras de Morphée. Avait-elle compris le jeu qui se trame sans en comprendre les mots? Assurément oui, le jeu de la séduction transcendant tous les langages, ethnies et autres convenances. Au loin, un homme, apparememnt de son ethnie, l'attend. Elle fait mine se passer sans le voir mais se laisse tendrement enlacer dans un petit rire contenu. L'atmosphère est �  l'érotisme dans ce petit paradis reconstruit de toute pièce.

Saskia découvre ce qu'est être femme, elle qui n'a jamais connu la plaisir de se donner �  un homme de son plein gré. Elle découvre avec étonnement sa volonté profonde de ne pas résister, de ne pas se défiler devant les avances de son partenaire. De ne pas contrôler mais au contraire de se laisser emporter par le vent de volupté et de fantaisie de Beauchêne.


- Cela est plaisant... et puisque tu joues ainsi... elle laisse un moment le silence l'emporter juste après el tutoiement initié par le Français... je ferai de même. Au Diable les conventions!

Elle joue alors d'un geste suave: le pion protégeant la reine se déplace d'une case en diagonale, ouvrant le passage �  cette dernière, juste en face du roi adverse. Au moment où elle joue, un pan de sa chemise trop lâche glisse doucement (intentionnellement?), dévoilant �  la lumière de la bougie son épaule et le haut de sa gorge.

(http://img69.imageshack.us/img69/9578/saskia12.jpg)

Elle se sent ennivrée par ce jeu sans règles fixes, découvrant avec délice un monde nouveau où s'abandonner n'est pas synonyme de danger. Un rêve dont elle ne voudrait pas se réveiller...




   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 30 Octobre 2011 à 17:38:17
Ostensiblement avec calme – Ventre Saint Gris ! Voilà qui n’est pas chose aisée -  il but une gorgée de vin et alluma sa pipe pour cacher son trouble.

Intentionnel de faire glisser le vêtement sur son épaule … Certes non !  Encore que ?
Mais, ne pas remettre d’ordre dans sa tenue … ?
pensa -t-il.

Une partie d’échec comporte plusieurs phases. L’ouverture – une demi douzaine de coups tout au plus -  ne demande pas une attention très importante, ce sont des coups presque convenus, impliquant des réponses assez conventionnelles. Saskia répliquait de façon inusité mais c’était pour l’instant sans danger.
 
Robert compris cependant qu’il ne pouvait gagner cette partie ci. S’il aurait encore assez de concentration pour développer ses pièces sur l’échiquier, il savait dès �  présent que quand viendraient les échanges et les combinaisons il ne parviendrait jamais �  faire abstraction de l’ambiance, de cette atmosphère, de cette femme sublime assise face �  lui et de   …

CETTE PEAU BLANCHE A PEINE  DEVOILEE !

Peau blanche car, si depuis qu’il était dans les Caraïbes il avait acquis un teint halé, Saskia ne pouvait �  aucun moment s’exposer au soleil … et aux regards.
Elle avait donc le teint des européennes du Nord. A l’inverse des négresses, des mulâtresses où des caraïbes, les femmes blanches ne montraient jamais leurs chevelures dénouées où la moindre parcelle de leur peau, hormis �  leur époux où amants.

L’ECLAIRAGE TREMBLOTANT DES BOUGIES CREER  UN JEU D’OMBRES ET DE LUMIERES SUR SON  EPAULE ET LA NAISSANCE DE SA GORGE !    

Il n’était pas expert dans cette  autre partie l� . Oh ! Bien sûr, il avait déj�  quelque expérience, une Iroquoise, une Algonquine et quelques ribaudes, mulâtresses où quarteronnes, dans les ports où il avait séjourné. Une seule fois avec une femme blanche, c’était �  Tadoussac en Nouvelle France, une jeune et belle épouse d’officier. Elle avait été attiré parce qu’il était �  demi sauvage et c’est elle qui avait pris toutes les initiatives.
 Il avait quelques peines �  se remembrer (*) ces conquêtes l� .
 
AFFRIOLANTES RONDEURS OU IL DOIT ETRE SI DOUX DE POSER SES LEVRES !

Cela n’avait rien �  voir avec ce qui se dessinait �  présent. Il découvrait ce soir, l’intense plaisir de l’approche. Un peu ce que ressent un chasseur effectuant une longue traque. Cependant, comme coureur des bois, il avait chassé pour les besoins en nourriture de son groupe. Comme flibustier, il courrait sus aux ennemis de son Roy sans état d’âme. Ce soir, s’il parvenait �  ses fins, il n'était encore sûre de rien, il y aurait une hallali exaltante, voluptueuse.

Aussi inexpérimentée que lui, semblait-il dans cette sorte de jeu, elle possédait comme lui cet instinct du chasseur, car qu’est-on d’autres lorsqu’on est flibustier aux aguets d’une prise et de son butin ?

Qui en fait, ce soir est la proie ?
Je suis dès �  présent plus qu'�  demi engagé dans ses rets !
Qu'il doit-être agréable de se faire dévoré ! Elle a des dents magnifiques !


ELLE VA DEVOIR JOUER A NOUVEAU. EN VERRAI-JE UN PEU PLUS ?

Il prit son fou du roi, le posa où était le pion joué le coup précédant. Il fermait ainsi la brèche, mettait en jeu cette pièce et tenait sous sa menace, où défendait, deux diagonales.


(*) Qu’allez vous croire ? A cette époque, ce mot était utilisé pour : se remémorer. D’où est issue d’ailleurs le mot anglais : remember !    
   


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 14 Novembre 2011 à 22:42:12
Ce diable de Français sait y faire!, se dit la belle tout en observant Beauchêne, visiblement déstabilisé par l'attitude de la blonde Néerlandaise, mais sachant garder son sang froid et se concentrer sur le jeu d'échec. Sa réplique montre �  quel point il est capable de se maîtriser et de ne pas perdre la tête... qualité fort apprécié par la corsaire. Car plus d'un a tenté d'obtenir ses faveurs en usant de sa force ou de tout autre artifice viril... en vain. Ce n'est pas ce qu'elle recherchait.

Alors qu'elle continue de jouer, cette fois concentrée sur le jeu d'échec, Saskia s'étonne de s'ouvrir ainsi �  des sentiments et sensations jusqu'ici inconnues. Une sensualité qu'elle s'était interdite de part sa position �  bord, ou toute autre raison plus ou moins fumeuse. Car la peur de perdre le contrôle était en fait son vrai moteur.

Elle se surprend alors caressant d'un doigt négligeant le roi d'ébène, pensive, attendant que son adversaire joue son coup. Un geste involontaire, machinal, chargé de sensualité, trahissant probablement ses désirs qu'elle ne s'était toujours pas avoué. Arrêtant net son mouvement lancinant, elle lève le regard et croise alors celui de son adversaire, rougissant �  la lumière de la bougie.


Je...

Le jeu a évolué sans que les deux corsaires ne s'en rendent compte, tellement leur esprit est �  autre chose. Certains coups, d'ailleurs, semblent hasardeux. Voire précipités. Comme si la conclusion était attendue avec fièvre. Jusqu'au moment où le roi blanc du corsaire français  se trouve (involontairement?) en situation de mat, coincé par un mouvement de la reine noire. Le jeu se terminait enfin, comme l'espérait et le craignait en même temps Saskia.

Mijn God, Robert! On dirait que tu es échec et mat... 

Elle se lève alors lsilencieusement. Un mouvement marqué par une certaine nervosité. Puis elle s'approche de Beauchêne, se dévoilant plus �  la lumière de la lampe posée �  son côté. Il peut alors �  loisir le jeu des ombres créées par les plis du tissu léger et ses rondeurs �  peine voilées. Le silence est alors pesant.

Je n'ai jamais aimé ce terme... "échec et mat"...
Qu'est-ce que l'échec sur l'échiquier s'il est le prix �  consentir pour y gagner... un coeur?


D'une main, Saskia caresse alors du bout des doigts la joue de Robert. Lentement. Doucement. Tendrement. S'étonnant elle-même qu'elle en soit capable, après tout ce qu'elle a vécu. Elle ne trouve aucun mot �  dire, tellement ce qu'elle vit �  l'instant est inconnu. Ce désir de se laisser porter, de ne plus rien contrôler. De s'oublier. Elle recule alors, sortant de la lumière des bougies. Seul le soleil couchant en contre-jour permet �  Beauchêne de voir, si ce n'est deviner, le mouvement qui fait soudain chuter sans un bruit la chemise de Saskia.

Elle se retourne alors vers lui, les mains pudiquement et maladroitement posées sur sa poitrine généreuse.


(http://img403.imageshack.us/img403/6441/b25a3ad6f20d987f.jpg)
Ik schaam me... dit elle tout bas, comme une supplique. Kom spoedig... ik smeek... Robert...

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 19 Novembre 2011 à 16:06:04
Il avait perdu la partie comme il l’avait prévu.
Il avait juste tenté d’en retarder l’échéance – ce qui lui permettait d’admirer Saskia tout �  loisir – pour se donner du temps car il appréhendait la suite.
Il découvrait qu’il manquait d’expérience en ce domaine. Oh bien sûr, il y avait l’Iroquoise et quelques Algonquines. Il y avait la femme de l’officier Français. Il y avaient eu les ribaudes des ports. Mais aucune n’avait exigé de lui qu’il mérite pour obtenir.

Saskia avait, lui semblait-il, envie de s’offrir mais il avait conscience qu’il devait mérité sa conquête. C’était bien l�  la difficulté due  �  son manque d’expérience. Il craignait qu’un geste malencontreux, qu’une parole malvenue ne brise le charme.

Il fut grandement soulagé quand Saskia prit l’initiative. Il ne comprenait pas les mots mais espéra en avoir compris le sens.

ELLE S'OFFRAIT !!!

Il se leva, lui fit face. Il dénoua les lacets de son col de chemise et passa le linge de fine batiste par dessus tête. Dans l’éclairage diffus, son torse hâlé, presque imberbe, faisait apparaître de nombreuses marques où la peau diaphane brillait. Blessures pour la plupart reçues pendant les années passées parmi les sauvages de Nouvelle France.
Torse nu, il approcha Saskia, lui caressa du dos de la main une de ses hanches, lui enlaça la taille et la serra contre lui.

- Tu es vraiment sublime ! - Tu es une femme surprenante �  tout point de vue ! - Je meurs d'envie de toi.

De sa main libre il lui releva doucement le menton d'un doigt et sa bouche chercha celle de Saskia.  
  
   


Titre: Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Jacquotte le 21 Novembre 2011 à 22:28:14
Le jour se lève sur St Eustache.

Les bruits assourdissants de la nuit caribéenne, faits de coassements des petites grenouilles, des mabouya, des chants des kapri bwa et autres vibrisses, font place aux sons plus doux des chants des oiseaux des îles aux plumes chatoyantes et au vol feutré.  

Un petit "Cici Zeb", perché sur le rebord de la terrasse de la maison coloniale, chante �  tue-tête, réveillant Saskia, corsaire néerlandaise, dans les bras de Robert Beauchêne.


Chant de l'oiseau (http://www.memoclic.com/medias/sons-wav/2/649.mp3)
(http://www.myfinepix.fr/sites/default/files/imagecache/full/gallery/419362/lever_de_soleil.jpg)

Le beau Français dort encore. Il ronfle même, épuisé par sa nuit mouvementée dans les bras de sa maîtresse. Saskia se dégage doucement de son étreinte pour rejoindre le petit oiseau sur la terrasse.

Chut! Tu vas le réveiller! lui souffle t'elle.

Le Cici Zeb cesse alors, la fixant d'un air étonné. Comme s'il était témoin et complice de la scène emprinte de paix de ce matin. Une servante, qui attendait non loin le réveil de sa maîtresse, réagit alors, apportant un grand linge blanc pour la revêtir. Nul besoin de longs discours, un sourire entendu entre femmes suffit, et un petit rire amusé de la servante et des enfants jouant non loin en dit long sur la complicité de ceux qui vivent en ce petit paradis reculé où l'on ne peut arriver que par la mer.

Quelques servantes s'activent alors pour ramener le petit déjeuner qu'elles avaient, semble t'il, préparé depuis peu et maintenu au chaud, attendant le réveil des amants fatigués. Saskia s'amuse �  les regarder babiller. Elle sait de quoi elles parlent et apprécie cette candeur que ces femmes ont encore, malgré les épreuves et la captivité. Malgré le déracinement et les horreurs qu'elles ont pu voir ou endure avant qu'elle ne les recueille.

Elle ne peut s'empêcher de faire le parallèle de sa situation avec la leur. Tout les sépare, mais elles ont cependant beaucoup en commun, notamment d'avoir traversé des épreuves douloureuses, de s'être adaptées �  un environnement hostile. Saskia est devenue une corsaire respectée par son équipage et redoutée par les navires de commerce espagnols et anglais sur lesquelles elle fond sans crier gare, les mettant hors d'état de nuire souvent sans essuyer la moindre perte �  force de manoeuvrer autour de sa proie et de lui asséner des frappes chirurgicales de ses couleuvrines �  fort calibre importées de France. Mais elle est aussi l'insaisissable cible des navires cherchant �  l'arrêter dans son activité, profitant de sa manoeuvrabilité et de sa vitesse pour fausser compagnie �  ses assaillants lorsqu'elle juge le combat trop incertain.

Oui, elle est devenue cela... mais cette nuit, une autre femme a vu le jour, et cela nourrit un doute en elle. Son appétit sexuel, son audace dans ce jeu amoureux, mais également sa soumission dont elle tiré tant de plaisir. Est-ce vraiment elle? Et que dire de ces moments où des désirs de maternité et de vie paisible l'ont envahi, alors qu'elle s'endormait dans les bras de son bel amant? Elle secoue la tête, comme pour se raisonner. Ce rêve est irréalisable dans le monde de la flibuste. Irréaliste même. Voire dangereux. Mieux vaut prendre la vie comme elle vient et savoir en  goûter les rares plaisirs.

Alors qu'elle reste ainsi pensive �  le terrasse, elle entend les draps glisser derrière elle, quelques gémissements, puis les pas de Robert la rejoignant.


Goedemorgen... bien dormi?

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 22 Novembre 2011 à 22:05:03
Robert émergea du sommeil profond où cette nuit inénarrable l’avait plongé. Une variation de la nature des bruits environnants, le discret babillage des servantes, l’absence de Saskia �  ses côtés … et la faim.
Il n’ouvrit cependant pas de suite les yeux comme pour prolonger cet instant de plénitude et de félicité. Et puis, les draps embaumaient encore l’odeur enivrante de Saskia, conservaient encore la tiédeur de son corps �  la peau souple et soyeuse, gardait l’emprunte de ses rondeurs affolantes.

Cette nuit, il avait découvert.
Pour la première fois, il était resté attentif �  satisfaire sa partenaire, �  … « DONNER» !
Ce qui n’avait pas été si facile dans l’état d’excitation où la soirée l’avait amené.
Jusqu’�  cette nuit, il s’était toujours contenter d’assouvir son envie entre les cuisses ouvertes des femmes. A « PRENDRE » son plaisir sans jamais se préoccuper de sa partenaire.
Cette nouveauté lui fit presque peur.
-   Ce doit être l’âge ! » se mentit-il pour refouler un sentiment confus.

Il rejeta le drap. Depuis la terrasse, il entendit Saskia lui souhaiter sans doute le bonjour en néerlandais puis lui demander s’il avait bien dormi.

-   Bonjour ! J’ai dormi comme une marmotte. Toi aussi j’espère !

 Puis il continua avec un petit air amusé.

-   Même si le sommeil fut d’assez courte durée me semble t-il.

Il se leva, enfila rapidement sa culotte et sa chemise. Pieds nus, il rejoignit sa belle amante sur la terrasse. Il l'admira lorsqu'elle se tourna vers lui.

-   L’amour te rend plus belle encore si c’est possible.

Il passa délicatement un doigt sous les yeux de Saskia.

-   J’adore ces cernes sous tes yeux. Elles les mettent en valeur.

Puis à voix presque inaudible tout près d’une charmante oreille.

-   Et elles flattent mon orgueil de mâle.

-   Si le petit déjeuner peut attendre, j'aurai plaisir �  aller jusqu'au ponton pour nager un moment. M'accompagneras-tu ? Je présume que tu sais nager car j'ai entendu �  Saint Eustache qu'on t'appelait Saskia des flots ! Moi j'ai appris �  nager avec les Iroquois. la Nouvelle-France est riche de lacs et de fleuves et il vaut mieux savoir nager quand le canoë se retourne.    


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 12 Décembre 2011 à 21:51:51
Saskia savait nager bien sûr.
Elle l’emmena non pas près du ponton mais dans une petite anse toute proche où ils se baignèrent. Robert en aurait bien profiter pour faire �  nouveau l’amour mais, soitqu’elle n’en eut pas envie, soit qu’elle craignit d’être vu par les gens de sa maisonnée,elle ne répondit pas �  ses avances.
Ils revinrent �  l’habitation et prirent un solide petit déjeuner. Robert et Saskia passèrent le plus clair de la journée ensemble. Ils se racontèrent comment ils en étaient venu �  se rendre dans les Caraïbes et �  y mener la vie qui était la leur.
La journée s’avançait et Robert comprenant que Saskia était redevenu le capitaine corsaire et la propriétaire d’une grande plantation demanda �  être ramené au port pour y retrouver son navire et son équipage.
Les adieux furent brefs. Saskia resta sur le ponton de Golvengeval quand le cotre emportait Beauchêne.
 Il refoula ses sentiments se disant qu’il était trop jeune pour se fixer et qu’il lui fallait encore courir l’Aventure. Pour Saskia, �  présent qu’il connaissait son histoire, il pensa qu’elle avait voulu, avec lui, rejeter au loin ses démons.
A peine fut-il revenu �  bord qu’il donna l’ordre de lever l’ancre. Personne �  son expression fermée ne posa la moindre question.


L’Amour n’a point l’heur de faire bon ménage avec Dame Chance. C’est du moins ce que pensa bientôt Robert de Beauchêne.
Pendant les deux mois qui suivirent, les navires rencontrés étaient soit trop forts de canons et d’équipage soit si maigre de cargaison que le butin ne couvrait pas la dépense. A plusieurs reprises, il fallut fuir pour n’être point pris et par deux fois même, Robert dut  amener son pavillon et être rançonné par des gouverneurs �  la cupidité sans borne.
Par un ami, il apprit un jour qu’une corvette était �  vendre �  Port Royal. Il s’y rendit et engageant tout ce qui lui restait de fortune en fit l’acquisition et parvint a l’armer de quelques canons.
Enfin, la chance fut �  nouveau sa compagne.     
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 14 Décembre 2011 à 14:06:20
                                                                           ooo00O00ooo

La perte de la corvette "Salamandre".

Les deux caporaux de la garnison du fort Saint Antoine profitaient d’une pause dans leur service. Ils fumaient leurs pipes accoudés �  l’un des créneaux dépourvu de canons.

-   Tiens ! Regarde les gars de la frégate s’escrimer sur leurs avirons pour amener leur navire dans la rade.

-   Oui-da ! Avec cette chaleur j’voudrais pas être à leur place.

Les deux chaloupes de Salamandre remorquaient, faute de vent, la corvette hors du port. Les  seize rameurs de chacune d’elle ahanaient, torse nu, le dos luisant de sueur. Les tolets grinçaient et les avirons pliaient sous la contrainte.
Lentement, le vaisseau s’écarta du quai. Il prit un peu d’ère et les deux caporaux constatèrent que les équipages des chaloupes n’étaient plus soulevés de leurs bancs de nage lorsqu’ils tiraient sur les avirons. Ils leurs fallut quand même près d’une heure pour amener la corvette au milieu de la rade où elle jeta l’ancre. Les aussières furent larguées par les embarcations et remontées toutes dégoûtantes d’eau où elles seraient lovées dans la soute aux câbles.
Les chaloupes vinrent se ranger le long du bord et les hommes embarquèrent sur le navire. L’une des embarcations fut remontée �  bord et arrimée sur son chantier, l’autre resta le long du flanc bâbord de la corvette.

-   M’est avis qu’elle  lèvera l’ancre avant le lever du jour.

-   Oui- da ! Mon compère. J’ai su par des marins qu’au petit jour il y a toujours  une brise de terre qui se lève et qu’elle disparaît quand le soleil monte sur l’horizon. C’est ce qui permet aux vaisseaux de sortir de la rade alors même qu’il n’y a pas de brise : la « bonasse » comme ils disent. Bon ! Va falloir que j’y retourne avant que le sergent ne me cherche.

-   Il est dur avec toi ?

-   Ho, j’ai vécu pire !    

Il vida sa pipe en la tapotant sur le créneau, la rangea  dans une poche de sa tunique et emprunta le roide escalier du chemin de ronde qui menait �  la cour intérieure où les hommes de sa compagnie commençaient �  se regrouper.

-   Qu’allez-vous faire aujourd’hui ? demanda son compère.

-   Marche et contremarche jusqu’a Gros Morne » répondit-il par dessus son épaule.
-   Nous autres soldats, c’est pas torse nu ! Et ça durera plus longtemps que ce qu’on fait les matelots de la frégate » ajouta t-il en maugréant.

-   Bon courage ! Moi je prend la garde au bastion Nord ce soir.

-   Alors on se revoit demain matin pour la soupe. Salut !    


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 16 Décembre 2011 à 21:57:57
A bord de Salamandre où les manœuvres  dues au déhalage avaient pris fin, l’état-major de Beauchêne se retrouva dans la spacieuse chambre arrière. Les vastes fenêtres joliment inclinées vers l’intérieur, éclairaient agréablement la grand-chambre. Les miroitements  de la mer et du soleil se reflétaient en un superbe jeu mouvant de lumière.

-   Messieurs, servez vous ! les flacons  et les boujarons sont sur la table. Buvons au succès de cette campagne.

Il y avait l� , le second, le bosco, le canonnier et le quartier maître. Tous, compagnons depuis peu et donc �  peu près inconnu de Beauchêne.

-   Tout l’équipage est à bord ?

-   Oui Capitaine » répondit Raveneau le second.

A l’intention du bosco :

-   Faites frapper des lanternes en bout des vergues basses. Je désire que de l’avant �  l’arrière le pont soit visible cette nuit. Monsieur Raveneau va faire doubler les sentinelles. Je ne voudrai pas apprendre demain matin �  l’appareillage que nous avons eu des défections. Nous avons un équipage de vauriens en qui je n’ai pas confiance. J’ai besoin de tout mon monde.


Beauchêne avait décidé de descendre cap au Sud  le long des Isles du Vent jusqu’au approches de Marguerita puis cap Ouest le long des Isles sous le vent jusqu’�  la longitude de Maracaibo.
La campagne débuta fort bien, il s’empara coup sur coup d’une flûte de commerce hollandaise, d’un sloop et d’une goélette franche espagnol et ce, sans perdre trop de monde. Il décida de garder le sloop comme annexe. Armé d’une dizaine d’hommes, le sloop lui permettrait d’étendre la surface de mer surveillée en naviguant en limite de visibilité de la frégate. Il permettait en outre d’aller dans les ports pour s’informer des navires présents et de ceux prêts  �  mettre sous voiles. Il en avait confié le commandement �  son fidèle Goliath, le géant noir qu’il avait affranchi après l’une de ses toutes premières actions comme capitaine de flibuste.

Un matin, au large de Bonaire.
 Beauchêne apparu sur le gaillard arrière, par le panneau d ‘écoutille.

-   Bonjour capitaine » lui lança l’officier de quart.

-   Bonjour monsieur Lambert ! – Tout va bien ?

-   Oui capitaine ! Tout va bien �  bord. Le sloop de Monsieur Goliath n’est toujours pas en vue … mais cela ne devrait pas tarder.

-   Demandez �  l’un des mousses d’aller me chercher ma longue vue. J’ai oublié de l’emporter et je vais monter jusqu’aux barres de perroquets pour voir s'il est visible.  
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 17 Décembre 2011 à 19:16:22
L’un des gamins lui apporta rapidement la longue vue. Beauchêne descendit l’échelle du gaillard, sauta lestement sur la lisse bâbord, s’accrocha aux enfléchures du grand mât et entreprit l’ascension.
Dans la grand hune, trois hommes détectèrent son approche �  la tension saccadée des haubans.

-   Range les cartes Durand v’là quelqu’un !

La tête du capitaine émergea par le trou du chat.

-   Ah bonjour Capitaine ! » lancèrent-ils avec un ensemble de gamins pris en faute.
 
-   Comment se fait-il que vous soyez trois ?

-   Rampier et Gaubert sont venus me tenir compagnie et m’ont apporté une mangue. » s’empressa de répondre Durand.

-   C’est bon. A présent Rampier et Gaubert descendez maintenant. Quand �  vous … ?

-   Durand, Capitaine.

-   Durand donc, faîtes bonne veille. Le sloop n’est toujours pas en vue ?

-   Non mais sur la côte la brume matinale n’est pas encore levée.

-   Je monte jusqu'aux barres de perroquet, de là haut il sera peut-être visible.

Beauchêne reprit son ascension pendant que Gaubert et Rampier se laissaient glisser jusqu’au pont par les galhaubans.
Une fois l�  haut, Beauchêne enjamba les barres, s’y assit confortablement. Il ouvrit son instrument, colla l’œil �  la lunette et fit la mise au point. L�  bas, loin �  bâbord, il discerna la côte noyée dans une brume diaphane. Une tache plus blanche nécessita toute son attention.

Une voile ? se demanda -t-il.

Des cris confus lui parvinrent venant du pont, quatre perches (*) plus bas – signe de désordre qui ne l’étonnait pas vraiment avec un tel équipage –

C’est bien une voile. Un sloop, c’est à présent certain.

Au dessous, les cris duraient et se faisaient plus forts. Excédé, il cessa son observation et dirigea son regard vers le pont. En bas,des hommes courraient en gesticulant sur les gaillards et sur le tillac, de la fumée s’échappait du panneau d’écoutille arrière. Des flammes apparurent.

-   Sainte mère de D …

Un énorme champignon �  volute rouge et noir, une déflagration formidable....
Le corps de Beauchêne s’envola dans les airs avec le mât de perroquet.

(*) 1 perche = 7,15m soit quatre perches, près de 30m au dessous de Beauchêne !
 
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 18 Décembre 2011 à 11:37:48
Le sloop commandé par Goliath – car c’était bien lui qu’avait aperçu Beauchêne juste avant la catastrophe – récupéra le capitaine de La Salamandre. Seul survivant d’un équipage de près de cent trente hommes !
Dans quel état !
Beauchêne resta prostré pendant deux jours et sourd cinq de plus. Hormis un poignet cassé – le droit et heureusement, car il était gaucher – il n’avait aucune blessure grave. Lorsqu’il put �  nouveau entendre, que les sifflements dans les oreilles s’atténuèrent et que son mal de tête s’estompa, il  se trouvait dans la chambre d’une auberge de Tobago. Goliath �  son chevet lui donna quelques informations.

-   Nous étions �  peine dégagés des brumes de côte quand notre vigie annonça que les perroquets de la corvette étaient en vue. Nous avons mis le cap dessus. Un peu plus tard, La Salamandre était coque visible. Tout �  coup, une énorme boule de feu et quelques secondes plus tard l’énorme bruit malgré la distance. Nous avons tout de suite compris que la corvette venait de sauter – la sainte barbe sans aucun doute – nous avons fait force de voile pour rejoindre. La suite a été terrible Capitaine. Sur près d’un demi mille (*) ce n’était qu’espars et planches �  demi calcinés et partout des corps mutilés, brûlés. Nous n’avons découvert que quatre rescapés mais vous êtes le seul survivant. Les autres sont morts �  bord du sloop, un seul était encore en vie �  notre arrivée ici.

-   Où sommes nous ?

-   A Tobago Capitaine. Vous avez eu de la chance. On vous a trouvé juste comme les requins arrivaient �  la curée. Vous enlaciez encore un tronçon du mât du grand perroquet et vous teniez toujours votre lunette d’approche dans la main gauche mais vous étiez inconscient. Votre lunette est l� , je l’ai fait démonter et nettoyer par un marchand qui vend ce genre de chose en ville.


(*) Un mille marin où mille nautique = 1852m     

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 28 Décembre 2011 à 19:02:19
L'Artaban.

La gigue du capitaine Beauchêne louvoyait parmi les quelques navires �  l’ancre et les innombrables petites embarcations de service. Beauchêne se tenait assis dans la chambre arrière. Il admirait le galion vers lequel se dirigeait le canot.
L’Artaban ! Son nouveau navire.
Un galion armé en guerre de neuf perches et dix pieds du roi (56 m) �  la flottaison, dix perches et cinq pieds du roi (60 m) de la quille �  la pomme du grand mât, deux perches du roi (11,80 m) au maître bau. Prévu pour porter 20 pièces de vingt quatre livres dans la batterie basse, 26 de seize livres dans la batterie principale et 12 pièces de huit livres et 6 de quatre livres sur le pont supérieur et les gaillards.
 Il  emportait un équipage de quatre cents hommes.
Un vaisseau bien plus redoutable que tout ceux qu’il avait commandé jusqu’�  présent.
Goliath, le géant noir �  qui Beauchêne avait offert la liberté �  ses touts débuts de flibustier et  qui pour l’heure tenait les fonctions de patron de canot – il était aussi l’ordonnance et le garde du corps du capitaine – crocha sa gaffe dans les haubans bâbord du galion. Beauchêne se leva, escalada prestement la paroi, enjamba la lisse et pris pied sur le vaste pont. Il fut accueilli par son second.

-   Bonjour Capitaine !

-   Bonjour Levasseur ! Où en sommes nous ?

-   Tout le monde est �  bord Capitaine. Le nouveau Maître canonnier également. Il est déj�  dans la batterie basse �  inspecter les grands canons.

-   Fort bien ! Faîtes lui savoir que je désire le voir dans l’instant. Je serai dans la grand-chambre.

Un peu plus tard.

-   Vous avez demandé à me voir Capitaine ?

-   Oui entrez ! Vous êtes donc notre nouveau maître canonnier ?

-    Si fait Capitaine, Antoine Pichegru. Tout le monde m’appelle « Boutefeux ».

-   Et bien va pour … Boutefeux. Pour peu que vous soyez un excellent canonnier.

-   Avec les vingt pièces en bronze que je viens de voir dans la batterie basse et les vingt six couleuvrines dans la batterie principale, nul doute Capitaine que vous serez satisfait de mes bons offices.

-   Nous verrons cela sous peu certainement, et tous ici pourront alors juger si vous méritez bien votre surnom. Retournez �  votre inspection, nous nous reverrons pour le dîner pour lequel j’ai invité tout le carré.

La remarque qu’il serait jugé  sur le mérite, où pas, de son surnom, lui laissait �  penser qu’il serait jugé sur ses actes. Cela l’inquiéta quelques peu et il partit bien vite.
Les aides canonniers et les chefs de pièce furent harcelés toute la journée par Boutefeux d’autant que les autres officiers qu’il croisait lui dire tous que  le capitaine : - était un canonnier émérite -  un amoureux des canons - qu’il ne pardonnerait pas la moindre faute - que jeune capitaine, il avait tué d’un coup de pistolet son canonnier qui avait omis après un abordage, de recharger le pièces avec des boulets et qu’au combat suivant il avait envoyé une bordée de mitraille alors que la distance était bien trop importante pour ce type de projectiles.

Les hommes sous ses ordres durent faire l’inventaire des accessoires de chaque canon, barres d’anspect, refouloirs, seaux, boutefeux, peaux de chamois pierres �  briquet, vérifier coffres �  boulets, chaînes, boites �  mitraille, bailles �  mèche et �  étoupes, contrôler les bragues et leurs pitons, les mantelets de sabord les tapes de bouche. Ils finirent épuisés, maudissant le maître canonnier, jurant de l’étouffer avec une poignée d’étoupe dès que l’occasion se présenterait.  
   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 13 Janvier 2012 à 18:26:25
A l’heure convenue, tout les officiers du carré de l’Artaban se retrouvèrent revêtus de leur meilleure tenue, sur le gaillard arrière. Levasseur, le second et président du carré, vérifia que tous étaient présents. S’y trouvaient donc, Le Guern le chirurgien dit « La Lancette » tant il aimait faire des saignées, Pichegru le canonnier qui, suite aux paroles du capitaine qui avaient été entendu �  travers les cloisons et rapporté �  tous, et que nul n’osait avant qu’il ait fait ses preuves l’appeler « Boutefeux », Wallace le Bosco - un Anglais Ho Sory !  un Gallois ! Ancelin le Maître charpentier dit – hors sa présence -  « Bois d’arbre », Nolleau le Maître voilier et Biscaye, vieille connaissance de Beauchène, le premier canonnier qu’il avait pu recruter �  son arrivée dans les caraïbes, qui �  présent assumait les fonction de lieutenant en troisième.
Tous étaient donc présent et Levasseur frappa �  la porte de la grand chambre, qu’ouvrit immédiatement Goliath qui se tenait aux aguets juste derrière.

Le dîner se déroula fort bien. Les mets servis – vivres fraîches puisqu’ Artaban était en rade – étaient succulents et les vins et les spiritueux étaient servis �  satiété. Beauchêne savait que ce dîner concourrait �  une meilleure connaissance des officiers entre eux. Il n’ignorait pas que c’était l� , gage de cohésion de l’équipage.
Oh ! Bien sûr, un repas n’y pouvait suffire.

Le lendemain, dans la matinée, Artaban releva ses ancres et mit �  la voile.
Avec un état-major qui se connaissait encore assez peu – et pour qui les vapeurs d’alcool n’étaient pour certains pas toutes dissipées – et un équipage fraîchement enrôlé  donc peu entraîné �  travailler ensemble, un observateur �  terre ayant quelque connaissance maritime aurait jugé les manœuvres d’appareillage  - désordonnées, assaisonnées de moult jurons et blasphèmes - de bien piètre qualité.
Artaban parvint tout de même �  gagner le large sans se couvrir de ridicule en manquant �  virer où en s’échouant sur l’un des bancs de sable du chenal de sortie de Tobago.

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 30 Janvier 2012 à 16:20:01
Les semaines qui suivirent furent occupées �  former l’équipage et a obtenir la cohésion indispensable �  un bon équipage. Quelques navires marchands firent les frais de ces semaines d’apprentissage.
Naviguant aux grés des vents –  où des humeurs du capitaine – Artaban jeta, un beau matin, l’ancre �  Martinique. Dès qu’il fut possible, Beauchêne se rendit au palais de son ami le gouverneur, le Marquis de Verneuil.

-   Asseyez vous, Capitaine Beauchêne.

Le ton plein de froideur, ce « Capitaine Beauchêne » lancé avec un air de presque dégoût, cueillir Beauchêne �  froid. Il se ressaisit rapidement.

-   Merci … Excellence !

-   Mes informations prouvent que vous vous en êtes pris �  plusieurs de nos navires. Ne niez pas je vous prie. Vous avez laissé la vie sauve aux rescapés de vos exactions. Vous n’auriez pas dû les attaquer … où vous n’auriez pas dû dès lors, laisser derrière vous des survivants . Ils ont témoigner et sont prêt �  déposer devant un tribunal.

Beauchêne allait répondre mais d’un geste péremptoire, le gouverneur le coupa.

-   Ne m’interrompez pas ! D’autre part donc,  vos « amabilités » envers la Hollande, depuis votre relation avec ce capitaine nommé Saskia, déplaisent fortement �  Monsieur de Ponchartrain notre Ministre de la marine et des colonies, qui est aussi je vous le rappelle le directeur de la Compagnie des Indes occidentales dont plusieurs navires ont fait les frais de vos égarements. L’église, depuis lors, vous soupçonne d’être passé �  la Réforme. Je sais bien que sur ce dernier point, c’est moi qui suis visé �  travers vous. Nul n’ignore en effet notre amitié et j’ai un différent grave avec l’Evêque concernant des terres. Au nom de cette "ancienne" amitié Capitaine Beauchêne, je vous prie de rejoindre votre bord et de faire le nécessaire pour mettre au plus tôt �  la voile. Je me verrai, si vous tardez, dans l’obligation de vous faire arrêter.

Beauchêne reçu ces propos comme des insultes. Il sortit de la poche intérieure de sa vareuse sa "Lettre de Marque" la déchira et la jeta sur le bureau de Verneuil. Il fit une révérence exagérant les mouvements de son chapeau et sortit.
L'entretien en resta l�  et Beauchêne se retira. Les termes "Capitaine Beauchêne" et "ancienne amitié" l'avaient blessé ainsi que le ton d'autorité de Verneuil. Il rejoignit "Artaban et s'enferma dans la chambre arrière.

   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 21 Février 2012 à 10:51:10
Le galion  Artaban   commandé par le capitaine Robert de Beauchêne  sortit du port sous huniers seuls. Il prit lentement de l’aire en défilant sous les canons du fort Saint Louis.
Sur une des terrasses du palais du gouverneur, son Excellence le Marquis de Verneuil, visage obstinément fermé, suivit le navire des yeux jusqu’�  ce qu’il disparaisse derrière l’un des caps ouvrants la Baie des Flamants.
A bord, les lourdes vergues des basses voiles pivotèrent, grand voiles et  misaine prirent le vent dans un sourd claquement.

-   A border les écoutes !

 Prenant de la gîte sous cette poussée, Artaban doubla les caps et entra en haute mer.

-   Cap Nord-Nord-Ouest !

Dans une lente et majestueuse courbe, le galion s’établit sur son nouveau cap.

-   Prêt et plein capitaine !» lança l‘homme de barre.

-   Bordez les boulines de grand-voile et misaine !

-   Fontignac ! Quand vous en aurez terminé ici, rejoignez moi dans la chambre des cartes. Nous avons �  déterminer notre route.

-   Bien capitaine ! Quelques vérifications sur le gréement et je vous rejoins.

Ils passèrent plusieurs heures �  déterminer les caps �  suivre pour rejoindre Santiago de Cuba. Beauchêne devait y retrouver les capitaines Scar et Macaster pour discuter d’une action combinée d’envergure : le saccage d’un grand port français. Jusqu’�  présent, Beauchêne se refusait �  participer �  ce genre d’action, du moins contre les français. Ce n’était dorénavant plus le cas. 

Une taverne �  Santiago de Cuba.
Beauchêne y retrouva non seulement les chefs de l’alliance « Blackwater » mais aussi plusieurs autres capitaines membres de cette alliance. Ils mirent au point les détails de l’opération. Ils visaient grand ! Rien moins que piller Nouvelle Orléans, ville défendue par une garnison de deux milles hommes  ! Ils se séparèrent après être convenus de la date de rendez vous dans ce grand port.

Beauchêne avait le temps avant le rendez vous, il partit donc en maraude �  la recherche de proies. Au cinquième jour, Artaban croisa la route d’un deux ponts espagnol et Beauchêne décida de tenter de le prendre.
Il y parvint après un dur combat aux canons mais Artaban fut réduit �  l’état d’épave et cela coûta la vie �  soixante dix hommes d’équipage. Beauchêne décida de garder le deux ponts bien moins endommagé. Il s’y transporta avec tout son monde et le baptisa Nemrod.

Artaban fut incendié. A bord de son nouveau navire, Beauchêne retourna �  Santiago de Cuba pour se réapprovisionner et compléter son équipage.
Quand Nemrod fut paré, le temps était venu de mettre le cap sur Nouvelle Orléans. Beauchêne s’y rendit donc, refusant �  plusieurs reprises le combat pour respecter les délais convenus avec l’alliance. Cela lui coûta car il croisa un vaisseau de second rang français et, n’eut été la crainte de manquer �  l‘alliance et de compromettre toute  l’opération, Beauchêne aurait bien tenté de s’en emparer.
Nemrod jeta l’ancre �  Nouvelle Orléans quelques semaines plus tard. Beauchêne constata en ouvrant la rade que plusieurs navires de la Blackwater étaient déj�  présents.   
Il avait été convenu avec Scar et Macaster que Beauchêne et son équipage auraient �  réduire le fort nord de la ville et l’arsenal de la milice bourgeoise situé �  proximité. Sous le prétexte de pêche pour améliorer l’ordinaire du carré, Robert partit avec quelques hommes �  bord d’un des cotres de Nemrod, reconnaître la côte au nord de la ville. Fontignac, le second, reconnu les abords du fort côté ville avec un petit groupe qui, bouteilles sous le bras, braillaient et chantaient avec force mimiques de marins en bordées. Quelques officiers subalternes reconnurent les abords du fort côté extérieur de la ville sous prétexte d’une partie de chasse.
Ayant collationné toutes les informations, Beauchêne vendit quelques marchandises, acheta de la poudre et des boulets comme le font habituellement les capitaines faisant escale et un matin, Nemrod sortit du port, route au nord.   


   


Titre: Re : Journal d'un canadien franà§ais devenu capitaine de flibuste.
Posté par: Beauchene le 24 Février 2012 à 11:23:40
Une plantation avait été repéré par les « chasseurs ». Elle était située en bordure de mer, peu éloignée de Nouvelles Orléans, une couple de lieues tout au plus, et offrait l’avantage  d’être équipée d’un ponton. Beauchêne l’avait donc choisi pour y débarquer ses flibustiers soit plus de cinq cents hommes. A la tombée du jour, Nemrod mouilla au large, derrière un petit cap qui protégeait le ponton des vent  et qui masquait la présence du navire aux gens de la plantation.
Une cinquantaine d’hommes, avec les chaloupes du bord, débarquèrent �  la nuit. Quinze d’entre eux se portèrent immédiatement sur la piste menant �  Nouvelles Orléans et y établirent un abatis pour interdire �  quiconque d’aller donner l’alerte au fort où �  la ville. Les autres investirent la plantation sans y trouver beaucoup d’opposition.
Ceci fait, Beauchêne fit procéder au débarquement de tout son monde.
Dans l’après midi du lendemain, la troupe au complet progressa lentement - �  cause des marécages - en direction du fort Nord. Ils se tapirent dans les sous bois �  quelque distance et y passèrent discrètement la nuit. L’attaque était prévue pour le lendemain matin.
Juste avant l’aube, tous se tinrent prêt, attendant le signal.

Au premier gong des cloches de la cathédrale, de violentes mousquetades se déclenchèrent un peu partout en ville et aux abords. Le gros des forces de Beauchêne monta �  l’assaut du fort surprenant la garnison. Une centaine d’hommes déborda le fort et attaqua l’arsenal où était serrés les piques et les mousquets de la milice bourgeoise. L’arsenal tomba rapidement et les bourgeois arrivant par petits groupes refluaient vers le centre ville semant la panique dans la ville.
La prise du fort fut une tout autre affaire.
Bien qu’une bonne partie des officiers étaient absents, logeant en ville, la garnison opposa une belle résistance mais céda finalement devant la furia désordonnée des flibustiers. Cent quarante Némrod y laissèrent cependant la vie. Beauchêne fit enfermer les soldats survivants dans les sous-sol du fort mettant ostensiblement deux canons de six livres chargés �  mitraille face �  la porte.
Les Némrod progressèrent ensuite vers le centre ville et les docks pour faire la jonction avec les autres équipages de la Blackwater. Sur leur passages quelques habitations cossues et deux églises furent pillées et tout ce qui portait jupons subit les derniers outrages. Quelques citadins et bourgeois payèrent de leur vie leurs oppositions aux viols de leurs épouses et filles où �  la mise �  sac de leurs demeures. Les nonnes et sœurs d’un couvent ne furent pas plus épargnées.

La ville tomba. S’ensuivit une semaine entière de pillage et d’orgie. Les parts de butin furent conséquentes.