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« Répondre #1 le: 05 Mars 2009 à 01:08:49 » |
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Agonie et Barracuda allèrent s'installer � une table dans l'arrière salle, Pulovsky restait boire avec les autres marins, qui semblaient avoir perdu leur joie communicative. -Alors, si on causait affaire, toi et moi ? proposa Barracuda en remplissant deux verres de tafia. -D'abord, fit Agonie en inspectant le contenu de son verre d'un air méfiant, je voudrais que tu m'explique ce que c'est que cet étrange rouleau dont tu m'as souvent parlé jadis, et qui t'obsède � ce point. Le Barracuda resta un moment silencieux, observant son propre verre. Puis il leva les yeux vers Agonie et répondit: -Tu dois avoir entendu parler du célèbre corsaire anglais Francis Drake ? Agonie hocha la tête, l'air intéressé. -Tu dois savoir, poursuivit le pirate créole, qu'il a contourné l'Amérique du Sud pour aller combattre les espagnols dans le Pacifique. A son retour en Angleterre, il avait accumulé un sacré trésor de guerre. Il avait pillé avec acharnement la flotte espagnole, et le plus gros de son butin était sur son bateau, le Gold Hind. Mais par peur de tomber sur ses vieux ennemis en approchant les caraïbes afin de rentrer au pays, il a transbordé la plus grosse part, environ 300 000 doublons, sur un autre navire de sa flotte, plus petit et plus discret. Ce bateau devait longer les côtes américaines et éviter les caraïbes pour rapporter la prise en Angleterre en toute sécurité. Malheureusement pour Sir Francis Drake, le chargement n'est jamais parvenu en Angleterre. Mais le corsaire avait ramené avec lui suffisamment de richesses pour que son exploit ne soit pas entaché par cet incident. Seulement avant son retour, le Royaume-Uni et l'Espagne avait signé un traité de paix. Mais ça, ça appartient � l'Histoire. Pour en revenir � ce rouleau, on sait que vers le milieu du siècle dernier, un moine érudit basé � Cuba avait découvert, d'après des récits de survivants de l'équipage du navire transportant les 300 000 doublons, que ce bateau se serait arrêté dans le Golfe du Mexique, pour n'en plus repartir, et que les marins, se trouvant alors dans une situation désespérée, avait tout bonnement caché l'or. Le Barracuda se tut, goûtant l'effet de sa révélation sur son partenaire. -J'adore quand tu racontes des histoires, fit Agonie avec un large et éclatant sourire, mais je t'en prie, continues, tu commences à m'intéresser. Après un ricanement, Barracuda enchaina: -Tu l'auras sans doute deviné sans que je te le dise, ce rouleau de parchemin, en peau humaine, ne révèle ni plus ni moins que l'emplacement de la plus grosse partie du butin de Drake! Le moine a utilisé un système de signes amérindiens, qu'il savait être un des rares hommes blancs � étudier, car il se doutait que si il exposait cette information au grand jour, toute la racaille des caraïbes se précipiterait sur les lieux pour s'en emparer. Le moine a été tué peu après, le rouleau est passé de mains en mains, on a perdu sa trace pendant quelques temps, puis il est réapparu, puis a redisparu, pour finir entre nos mains, nous, les personnes dont ce sympathique moine craignait justement l'avidité. Agonie contempla le rouleau déplié devant lui. Il passa sa main dessus pensivement, comme pour écarter une couche de poussière invisible. -Maintenant, murmura Barracuda en se penchant vers Agonie, tu me disais que tu savais résoudre ses symboles ? -Pas moi, répondit le français, mais quelqu'un de ma connaissance, j'en suis certain, le pourrait, lui. Ce n'est pas un ami, mais il me doit un service, et je pense qu'il serait disposé � me le rendre. -Et où peut-on le trouver, ce savant ? demanda Barracuda. -A la Tortue, répondit Agonie. Barracuda resta coit quelques secondes et éclata de rire. -Toi alors, jusqu'au bout tu auras été un empêcheur de tourner en rond! -Hein ? mais c'est la vérité! fit Agonie indigné et interloqué. -Je te crois, vieux filou, mais le problème, c'est que, aussi bizarre que ça puisse ta paraître, et au cas où tu ne serais pas au courant des dernières nouvelles , les pirates ne sont plus les bienvenus � La Tortue. -Quoi ?! -Et oui, les flottes anglaises et espagnoles ont prise d'assaut les principaux ports, et l'île est tombée en seulement quelques heures. Ça fait partie des mesures draconiennes prises par les gouvernements pour combattre, et anéantir notre société. -Mais merde, on est plus chez soi nulle part! La situation est si grave ? -Tu n'as pas idée, fit Barracuda en hochant la tête. Les chasseurs de pirates ont eu les pleins pouvoirs, se sont fait aider par la Royal Navy et des officiers de la compagnie des Indes. Résultat: seuls quelques équipages résistent encore, Bélenos en premier par ses actions d'éclats, les hommes de Taranis refont parler d'eux, et on dit que celui qu'on surnomme l'Etranger, ou encore l'Arabe est sorti de l'ombre, on avait plus entendu parler de lui depuis un bail. Et les hommes que tu as vu ce soir, ce sont des anciens hommes de l'équipage de notre vieil ami Englund et de la Tribade, Elisa Novalis, qui ne se sont pas fait choper, et qui ont décidé de se rassembler sous ma coupe, histoire de continuer l'aventure, plus longtemps, et ils le savent. -Dis donc tu m'as l'air bien pessimiste, Barracuda, observa Agonie. Ça te ressemble pas. Le flibustier se leva et vint se poster au seuil de l'arrière-salle pour contempler son équipage maintenant plus détendu et buvant bruyamment en compagnie de Pulovsky. -C'est parce que je sais que notre heure est bientôt venue, annonça le créole. Je ne resterais pas dans l'anonymat, et quand je reprendrais la mer, nos ennemis vont se précipiter de tous côtés pour nous mettre en charpie. Tu vois, si j'accepte de te suivre dans ta quête, c'est dans l'espoir de toucher le gros lot comme fruit d'une vie de combats et de peur, de fuite et de carnage. J'espère pouvoir assurer � mes gars, pour la plupart des anglais et des métis, une retraite tranquille et � l'abri de la justice. Je ne me fais pas d'illusion, toi et moi, les capitaines, les meneurs, on finira par la potence, par l'épée ou au fond de la mer. Personnellement, je n'ai jamais chercher la gloire, et je méprise ces soi-disant pirates idéalistes qui rêvent de liberté, qui se conduisent comme des seigneurs avec leurs prisonniers. Ils ont oublié ce que ça voulait dire être un pirate! -Je suis tout � fait d'accord avec toi, fit Agonie qui quitta son siège pour venir au côté de son ancien camarade de bord.. C'est pourquoi je te propose, en plus de faire jouer mes relations, de devenir ton second, et d'intégrer aussi le jeune Pulovsky, afin que nous formions enfin une vrai famille, et que nous oublions nos stupides querelles passées. En plus Pulovsky est un fin tireur, en plus d'être un poivrot invétéré. Qu'en dis-tu ? C'est l'occasion de finir en beauté, ou de tenir une dernière fois le défi! Tenter de survivre, et raccrocher pour de bon, pour voir tes enfants grandir, mes petits-enfants. Je tiens � les connaître, Touche-� -tout. Barracuda eut un rictus amusé par cet accès de sentimentalisme, et s'empara des deux verres. Il tendit le sien au français, qui, un sourire ravi étiré sur sa face tannée, dit: -Alors, associés, comme au bon vieux temps ? -Tope là, vieille branche, répliqua le créole. Et ils portèrent leurs verres à leurs lèvres.
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