EPILOGUE
Taranis est allongé, un sac de jute en guise d’oreiller sous la tête. Autour de lui quelques compagnons veillent. Son fidèle second est l� aussi � sa demande. Du sang mal nettoyé est resté sur sa joue. Son uniforme sale et déchiré laisse apparaître un pansement de fortune sur sa poitrine._J’avais envie de vous voir pour tous vous féliciter !
Dit-il avec un grand sourire. Je me réjouis de savoir que le « Blue Eyes » est toujours � flot. Nous avons sauvé nos bateaux ! On leur a donné une sacrée raclé � ces diables d’anglais ! Dommage que nous avons oubliés de les piller avant de partir. J’ai bien envie d’y retourner !
Plaisante Taranis. Vous vous êtes battus tous comme des braves mes amis. Je voulais aussi vous dire que sur la frégate j’ai reconnu son capitaine. Une ordure de première que j’ai pourchassé il y a longtemps. Malheureusement je ne sais pas si son cadavre nourri les requins ou s’il en a réchappé, ce lâche ! Il s’appelle Gordon. C’est un traître, moitié français par sa mère et moitié anglais par son père. Il est en partie responsable de ma déchéance et de ma fuite vers les Caraïbes. C’est comme ça que je suis devenu un pirate malgré moi. Si vous le croisez, passez lui mes salutations de ma part � cette vermine ! J’enrage ne pas encore l’avoir tué cette fois-ci !
_Je me ferai un plaisir de les lui transmettre mon ami !
Répond Xavor.
Puis Taranis poursuit sa discussion._Mais je ne regrette rien mes amis. Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu comme le disait un certain César. Même si je meurs un jour au combat, je serai resté libre jusqu’au bout. Tous nos compagnons disparus sont morts en homme libre et les survivant sont restés et resteront libres.
_Vous vous fatiguez capitaine.
Dit le second. Le chirurgien…
_Laisses le chirurgien ! Il m’a interdit de boire du cognac !
_Mais les stocks sont détruit ! Il ne reste plus rien.
_Oui… bon… enfin bref. De quoi parlait-on au fait ?
_De liberté.
Lance Seth. Vous parliez de liberté.
_Ah oui ! Et je t’ai vu � l’épreuve l’étranger. Je n’avais jamais vu quelqu’un se battre avec autant d’adresse et de fougue ! Un homme comme toi � la tête d’un bon équipage et c’est la fortune assurée parbleu !... Seth, car c’est comme ça que tu t’appelle n’est-ce pas ? Et bien Seth mon ami, tu as gagné ta liberté !
_Merci capitaine.
Seth et Xavor laissaient parler Taranis. Ils répondaient au minimum pour ne pas trop le fatiguer. La balle n’avait pas encore été extraite et le chirurgien attendait qu’il se rétablisse mieux pour intervenir de nouveau._J’espère que tu resteras encore un peu parmi nous le temps que tu t’enrichisses
enchaîne Taranis. Il y a des postes vacants maintenant � bord si tu le souhaites. Mon fidèle second saura te conseiller. Fidèle depuis le premier jour !
_Exact capitaine et je suis fière d’être sous vos ordres ! Mais vous vous fatiguez, ce n’est pas bon pour vous.
_J’ai bientôt fini. Seth, J’aimerai te présenter mon fils quand nous serons � la Tortue.
_Vous avez un fils ?
S’étonne Seth._Oui, de dix ans, « Xavier qu’il s’appelle », dont son parrain n’est autre que le « lieutenant » lui-même
indiquant le second. Il vit avec ma deuxième femme. Je souhaiterai qu’il voit ce que c’est qu’un vrai guerrier !
Seth n’a pas le temps de répondre que Taranis enchaîne déjà sur un autre sujet._Et vous mon cher Xavor, vous rendrez compte � l’occasion de la bravoure de Seth � la taverne de mon ami La Mouche. Je ne suis pas sûr d’y aller de sitôt ! Il y a Scar qui s’impatiente de me voir. Il aurait aimé être � cette bataille, ce vieux forban !
Xavor ne comprenait pas où Taranis voulait en venir. Son discours devenait de plus en plus confus._Scar ?! Mais il est mort !
_
Ca le reprend. La fièvre le fait délirer parfois. Explique discrètement le second à Xavor._L� où il est, il est bien vivant ! On a un projet ensemble, celui de piller les trésors du diable !
La discussion bon enfant continuait tranquillement. Taranis plaisantait malgré la douleur qui le lançait dans tout le corps. C’était surtout pour masquer son angoisse et paraître ainsi aux yeux de tous celui qu' il a toujours été ; optimiste et sans état d’âme.
Un peu plus tard Xavor et Seth avaient laissés le capitaine se reposer et ils s’étaient rendus sur le pont. Ils étaient pensifs, perplexes et ne savaient quoi penser de ce que Taranis leur avait dit. Il avait parlé comme si demain il remarcherait, et pourtant son discours ressemblait plus � ses dernières volontés, qu’autre chose.…
La nuit est fraîche pour la saison. La lune s’efface régulièrement devant les nuages qui passent indifférent devant elle. Les deux voiliers blessés filent tristement sur l’océan et tanguent lentement sur les vagues que le vent agite docilement. Sur le pont les lampes tempêtes se balancent, créant un jeu d’ombre et de lumière tiède qui se mélange avec celle de la nuit, une nuit pas comme les autres, une nuit où tout peut encore arriver, la joie comme le malheur.
Tard dans cette nuit une silhouette sur le pont du « Clipperton II » se dirige vers nos deux héros. C’est le fidèle second de Taranis que tout le monde surnomme « Lieutenant » faute de connaître son nom. Il s’arrête devant Xavor et Seth puis d’une voix grave…_C’est fini. Notre capitaine n’est plus. Son cœur a lâché.
Un jour passe, à nous d’écrire le suivant.
Taranis.