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Auteur Fil de discussion: Le vent de l'exil  (Lu 3753 fois)
Lord_Klou
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« le: 15 Novembre 2007 à 19:55:44 »

Il était une fois un petit enfant solitaire dans une grand château froid et gris perdu dans les brumes anglaises...

Louis était le cinquième fils d’un comte Anglais, Lord Wessex, le seul qu’il a eu avec sa deuxième femme, la comtesse française Isabelle de Saint-Cloud. Totalement délaissé par son père il en comprend très tôt les raisons : non seulement un cinquième fils n’a aucun intérêt pour un noble (une fois le premier en position d'héritier, le 2e dans l'armée et le 3e dans la prêtrise que faire des suivants ?) mais en plus le Lord, follement amoureux de sa femme, était jaloux du temps qu’elle consacrait �  son enfant. Celle-ci, �  vrai dire la seule personne de sa famille �  lui montrer de l'intérêt, le baignait dans une douce chaleur maternelle et le berçait de contines françaises charmantes. En fait le garçon ne parla guère que le Français pendant toute sa petite enfance, se contentant de quelques mots d'Anglais par-ci, par-l�  pour donner quelques ordres aux serviteurs.

Aussi �  l’âge de six ans il fût placé dans un monastère pour y faire son noviciat,
« bon débarras » se dit son père. Le garçonnet, en larmes �  son départ, découvrit bientôt que la règle monastique n’était pas si difficile �  suivre : il était déj�  habitué �  ne parler avec presque personne… il apprit enfin l'Anglais, le Latin, se révéla doué pour peindre et enluminer. A vrai dire il était la coqueluche de ce monastère, richement dôté au passage par son père il est vrai. Et quand le frère herboriste de l’abbaye de Chewingminster le prit sous son aile, en dehors des heures consacrées �  la prière ou �  l’étude des textes sacrés,  pour lui enseigner les vertus des plantes il découvrit tout un monde nouveau. Un monde parfois vachement planant…  
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Lord_Klou
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« Répondre #1 le: 18 Novembre 2007 à 13:36:44 »

Il semblait que le garçonnet trouve peu �  peu sa voie dans cet endroit merveilleux, avec toutes les connaissances de son époque �  portée des questions d’un enfant insatiable. Le tout baignant dans une bonhomie joyeuse, bien loin de l’austérité de certains établissements monastiques. Les frères de Chewingminster ressemblaient �  de vivantes publicités pour le bon vin et le bon fromage et leur générosité se nourrissait de leur amour de la vie et de la bonne chère. Deux années fertiles s’écoulèrent ainsi et l’enfant, s’il soupirait encore parfois en pensant �  sa mère, s’adaptait merveilleusement �  cette vie érudite.

Mais la vie réserve parfois des surprises : son frère William, fringant capitaine de l’armée royale, fit une magnifique charge de cavalerie, sabre au clair, dans une bataille quelconque perdue dans les brumes des Pays-Bas. A la tête de son régiment il avait fière allure, trois bonnes longueurs devant ses hommes, toutes les pièces métalliques de son équipement étincelant dans le discret soleil du petit matin. Une charge formidable qui se termina par une ridicule culbute : sa fière monture s’était pris le sabot dans une fondrière. Eventré au passage par son propre sabre, son cheval se retourna sur lui et il fut étouffé dans la minute par les entrailles puantes de sa propre monture ! Chocking, isn’t it ? Evidemment son général prit soin de passer sous silence les circonstances exactes de cette mort ridicule. Du moins envers la famille. Car dans son régiment l’expression « culbute williamesque » désigne désormais un comportement grotesque.

A l’occasion de l’enterrement Louis put passer un mois en famille. Enfin plutôt un mois avec sa mère, qui se languissait et �  laquelle il apprit �  faire quelques infusions rigolotes. Aussi son père fronça-t-il un sourcil étonné lors du départ pour le monastère en voyant son plus jeune fils et son adorable femme se rouler par terre de rire…
   
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Lord_Klou
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« Répondre #2 le: 25 Novembre 2007 à 12:24:37 »

Trois années passèrent et ce fut le tour du cadet, Edward, l’évèque, d’être rappelé �  Dieu. Ce saint homme mourut en plein office puisqu’il confessait en même temps dans la modeste sacristie de 600 m² de son palais épiscopal, trois pécheresses d’une vingtaine d’années, vêtues du plus simple appareil pour être plus proches de la doctrine de simplicité et de pureté de Notre Seigneur. Ayant sauvé les âmes égarées de ces pauvres, et magnifiques, jeunes femmes, son cœur éclata dans un transport de joie mystique. Le sourire d’extase figé sur les traits du brave homme ne laissa aucune doute sur sa paradisiaque destination...
   
Et ce fut un nouveau mois en famille pour Louis, passé en partie �  herboriser, en partie �  enluminer, en pouffant, le livre de récits coquins que sa mère avait fait venir de France. Il profitait de l’occasion pour parler cette belle langue qui avait baigné toute son enfance. A sa grande surprise son père lui posa pour la première fois quelques questions sur sa vie au monastère, il semblait que sa relation intime avec son épouse bénéficiait grandement des notions d’herborisme de son plus jeune fils. Il se sentait revigoré, plus jeune, plus endurant, plus émoustillé, plus détendu. Il s’amusait, notion nouvelle et étonnante pour un homme autrefois réputé pour son austérité. Et il posait sur ce plus jeune fils un regard qui n’avait plus tout �  fait la froideur d’autrefois.
   
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