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Mercantos
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« Répondre #1 le: 13 Juin 2007 à 14:31:36 » |
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« Muchas gracias amigo. »
Le sourire sur les lèvres du gouverneur lorsqu’il prononça ces mots ne collait pas avec ses paroles. Ce n’était pas de la reconnaissance, pas même de la politesse, c’était autre chose. Quelque chose d’indéfinissable et qui aurait pu être inquiétant pour quelqu’un qui ne naviguait pas sous le pavillon noir. Il raccompagna le capitaine Mercantos � la porte avant de faire signe � un garde de l’escorter jusqu’� la sortie du palais.
« Tous les mêmes. » pensa le pirate une fois dehors.
Le gouverneur venait de lui confier une mission. Mille pièces d’or avait il dit, cela pourrait s’avérer utile, le butin était déj� important mais ce nouveau navire demandait beaucoup d’entretien. Depuis que Mercantos avait décidé d’abandonner son sloop pour un galion et augmenté sa puissance de feu il devenait de plus en plus difficile de s’enrichir. Les canons crachaient les flammes de l’enfer certes, mais il fallait acheter de nouveau boulets � chaque escale, sans compter sur les proies qui coulaient sans livrer leur cargaison. Ils n’avaient pas encore l’habitude de cette puissance de feu et avaient encore du mal � la contrôler, les salves qui devaient affaiblir l’ennemi avant l’abordage l’envoyaient par le fond.
Voila pourquoi le capitaine était allé rendre visite au gouverneur de San Jùan de Puerto Rico. Ces pleutres étaient toujours prêts � faire affaire pour envoyer de braves pirates se salir les mains � leur place. Cette fois c’était un navire français qu’il fallait couler, s’il savait que leur venue � Puerto Rico était du � un gouverneur français qui les avait envoyé couler un navire espagnol… Tous aussi stupides les uns que les autres mais peu importe, ils payent toujours.
Le capitaine regagna son navire et après avoir vérifié que les provisions et munitions avaient été chargées conformément � ses ordres, il fit lever l’ancre. Toutes voiles dehors, un vent arrière les mena rapidement et sans grande encombre � bon port. La proie se trouvait ici, quelque part dans les eaux de Petite Goave, l’endroit où elle sombrerait assurément.
« Barre � tribord ! Réduisez la voilure ! »
Le second et le pilote faisaient bien leur travail, voil� des hommes qu’on aime avoir � bord. C’est en partie grâce � eux, et au canonnier qu’ils avaient trouvé � San Augustin, qu’ils avaient pu s’enrichir et en arriver l� .
« Voile en vue ! »
La proie… Enfin elle était l� , bientôt ils iraient � la taverne pour fêter leur victoire.
« Hissez le pavillon noir ! Aux postes de combats ! Ouvrez les sabords, paré � faire feu. »
Tous connaissaient leur rôle et le jouaient � la perfection. Les quatre vingt marins qui servaient déj� sur le sloop mais aussi les nouveaux qui s’étaient vite acclimatés.
« Que le carnage commence ! »
Le navire pirate filait sur l’eau comme une anguille vers son adversaire encore invisible. Soudain, la poupe fut visible puis le navire entier, se présentant par le flanc, conons pointé vers le galion.
« Un galion renforcé capitaine ! Je compte 50 canons et un équipage nombreux ! Pavillon français. »
Un galion renforcé, puissamment armé et bien équipé. Voil� qui expliquait le sourire du gouverneur. Milles pièces d’or pour s’attaquer � un gallon renforcé… Les français avaient payé presque le double pour abattre un sloop, il avait possédé les pirates et les avait envoyé � la mort !
« Qu’est ce qu’on fait capitaine ? On fuit ? »
Fuir… Attitude des lâches disent certains, mais sans doute n’ont-ils jamais croisé le fer et la poudre avec une forteresse des mers. Les matelots n’étaient pas dupes, le capitaine non plus. Tous se souvenaient de la frégate qui avait anéantie leur voilure et leur coque, tué plusieurs des leurs en � peine quelques tirs. C’est en fuyant qu’ils avaient survécu. A quoi bon être courageux quand on est mort ?
Mais cette fois c’était différent. Ils avaient un galion et de nombreux canons, ils pouvaient encaisser le choc de quelques boulets avant d’abandonner. Ils ne pouvaient pas partir sans essayer… Ils avaient engagé la frégate avec un sloop, le moins qu’ils pouvaient faire était d’en faire autant pour ce navire.
« Virez � bâbord, présentez lui notre flanc et feu sur mon ordre. »
Pas de discutions. Le ton de l’ordre ne le permettait pas et tous se mirent en œuvre pour l’exécuter. Le regard du second en disant long mais il n’osait ouvrir la bouche pour autre chose que répercuter les ordres du capitaine Mercantos.
« Tu n’es pas d’accord mon ami ? »
Le second hésita un instant avant de répondre.
« Je ne sais pas, ils ont l’air puissant et les français l’apprendront forcement… »
« J’espère bien qu’ils l’apprendront ! Ils verront de quoi nous sommes capables et devront payer plus cher nos services. Surtout quand ils verront notre nouveau navire. »
« Notre galion ? Ils savent déj� . »
« Je ne parlais pas de celui-ci. »
Le capitaine s’avança pour hurler � l’équipage.
« Camarade, ce soir nous fêterons la victoire dans la taverne ou nous reposerons sous l’océan. Mais si nous l’emportons, c’est un galion renforcé qui nous attendra au port ! Prenons leur navire ! »
Un cri secoua l’équipage qui redoubla d’efforts. Ils avaient augmenté leur butin de manière considérable grâce au galion, le galion renforcé l’augmenterait d’avantage. « Feu � volonté ! »
Les fracas des canons des deux navires couvraient presque les cris. La fumée obscurcissait la vue, rendant les manœuvres difficiles. L’odeur de poudre emplissait les narines et les poumons. Pas un seul instant de répit, pas une seconde pour réfléchir, pas un instant pour hésiter.
« Feu � volonté ! »
L’ennemi rendait coup pour coup. Ses canons supplémentaires lui devaient lui donner l’avantage mais la maîtrise des pirates compensait. Ils faisaient plus souvent mouche que les français.
« Il faut les aborder capitaine, sinon on ne s’en tirera pas vivants. »
Plus personne ne pensait � fuir. C’était trop tard, on ne peut pas tirer en fuyant et s’exposer sans riposte, c’était la défaite assurée.
« Oui il faut aborder. Pilote ! Rapproche nous de l’ennemi ! »
Se rapprocher, essuyer les tirs, se rapprocher encore. L’abordage était la solution en effet, mais quel en était le prix ? Les voiles étaient déchirées par les boulets, la coque craquait sous les asseaux, la mitraille déchiquetait l’équipage.
« Nous y sommes presque, paré � aborder. »
Le navire était difficilement manoeuvrable dans cet état et l’approche se fit plus lente que prévu.
« Ils reculent capitaine ! »
Le navire ennemi avait eu tout le temps de voir la manœuvre et de réagir, non sans en avoir profiter pour les affaiblir avant. Il gardait la distance pour empêcher l’abordage.
« Feu � volonté ! »
Il fallait en finir, et vite, sinon ils allaient se faire envoyer par le fond.
« Feu � volonté ! »
« Feu � volonté ! »
La dernière volée de boulets raisonna avec force. Plus que de coutume. Lorsque les fumées se dissipèrent, ils aperçurent le galion renforcé ouvert en deux par le centre qui sombrait corps et biens.
« Par l’enfer… »
Ils avaient gagné. Mais en même temps ils avaient perdu. Un navire comme celui-ci devait avoir une cargaison de plusieurs milliers de pièces d’or, sans compter qu’une fois le vaisseau au fond de l’eau on ne peut plus s’en emparer. Ils avaient tout perdu… Bien plus même qu’ils ne crurent au premier abord.
« On rentre au port, ensuite on pille tous les navires espagnols qu’on croisera ! »
Le regard du capitaine embrassa son navire avec horreur. Des voiles, il ne restait que des lambeaux, � peine pouvaient ils encore naviguer. La coque quand � elle avait été réduite en miettes, des voies d’eau étaient ouvertes un peu partout. Mais le pire restait � venir, des 150 hommes qui avaient embarqué, 25 restaient debout sur le pont. Les cadavres emplissaient le vaisseau et d’autres, français ou pirates, flottaient autour d’eux en silence.
Non seulement ils n’avaient pas pu gagner le navire ennemi ou sa cargaison, mais ils avaient perdu presque tout. Un tir de plus des français et ils se retrouvaient sans voiles, une brèche dans la coque ou plus assez d’hommes pour naviguer. Ils avaient frappé aux portes de l’enfer mais on n’était pas venu leur ouvrir…
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